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Les j3ux sont faits
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13 mars 2018

Doctor Who : Le Seigneur du Temps ou le Docteur contre les années 1990

Ce week-end, j’étais avec des amis et après un bon burger bien gras, la conversation a commencé à dériver sur le générique français de la série classique Doctor Who ou du doublage français du film spin-off "Docteur Who et les Daleks" qu'on dirait avoir été fait avec Jean-Michel Jeu-Dacteur (à voir tellement c'est drôle). Au final, on s’est posé devant le téléfilm Doctor Who de 1996, nous laissant dériver pleinement sur sa médiocrité et sa génialitude schizophrénique. Et cela fut cool. Et aujourd’hui, je vais essayer de vous expliquer pourquoi regarder ce film vaut la peine.

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Présenté comme cela, c'est classe. Quoi, cela n'engage en rien la qualité du produit final ? Oh mince...

Doctor Who commence en 1963. Voyage dans le temps et l’espace, poivrière mortelle, cabine téléphonique plus grande à l’intérieur et la série devient culte pour les grands bretons, puisque c'est dans leur pays qu'a débuté ce monument. Mais les années passant, la série s’essouffle ; sans audience, elle s’arrête au pied des années 90, plus précisément en 1989 après 26 ans et 26 saisons de loyaux services. Le peuple breton, triste de son absence, la pleurera et après bien des années de patience, la vit revenir en 2005. Et la série fut bonne, devenant culte aux yeux du monde. Elle a aujourd’hui plus de 50 ans et toutes ses dents.

Une bien belle histoire, n’est-il pas ? Mais que s’est-il passé durant les années 90 ? La décade sombre fut pauvre en Doctor Who. La série a survécu en romans, on a fêté les 30 ans en faisant un cross-over avec Eastenders ("Plus belle la vie" de l’autre côté de la Manche si vous préférez). C’était pas la joie. Jusqu’à ce que les Américains et plus particulièrement la Fox décident de financer un pilote pour relancer une nouvelle série, en partenariat avec la BBC. Nous sommes en 1996 et notre histoire peut enfin commencer.

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Prenez une tasse de thé et une aspirine, cela va devenir intellectuel.

Nommé sobrement Doctor Who, parfois sous-titré The Movie, on l’a connu chez nous sous le nom Le Seigneur du Temps. Commençons par le résumé de l’histoire.

Le Septième Docteur ramène les cendres du Maître, exterminé par les Daleks à la suite d’un procès, jusqu’à leur planète natale Gallifrey. Mais le Maître sous une forme diminuée réussit à saboter le TARDIS du Docteur qui se pose en catastrophe sur Terre, aux Etats-Unis, juste avant le réveillon du nouveau millénaire. Sortant du TARDIS, le Docteur tombe sur une bataille des rues et se prend quelques balles dans des endroits non vitaux. Emmené aux urgences, il se fait alors opérer du cœur, ce qui le tue et enclenche le processus de régénération. Pendant ce temps, le Maître prend possession d’un homme, engage un asiatique qui avait emmené le Docteur à l’hopital pour lui piquer ses affaires et essaye alors de piquer les régénérations du Docteur afin de survivre tout en risquant de détruire la Terre.

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Oh, mes yeux...

Vous avez rien compris ? Moi non plus. Il y a beaucoup trop d’éléments dans ce téléfilm de moins d’une heure et quart. L’élément perturbateur de l’histoire ne commence jamais vraiment et on case tout ce que l’on peut tout en essayant de rusher l’histoire. Et encore, je ne vous ai pas parlé de ce qui va vraiment se passer à la fin. C’est incompréhensible…

Et la première phrase de mon résumé est juste une paraphrase de l’intro du téléfilm ! Ensuite, on peut commencer sur les incohérences : pourquoi le Maître a été exterminé par les Daleks, pourquoi les Daleks font-ils maintenant des procès, pourquoi Skaro existe toujours (le 7ème Docteur ayant détruit Skaro et c'est un des grands arcs de son histoire). Bref, on s’en cogne, on met tout ce qu’on peut pour plaire aux fans. Des jelly babies en veux-tu, en voilà, le journal des 900 ans du Docteur, une écharpe multicolore qui passait par là, on essaye de faire plaisir aux fans sans vraiment comprendre ce qu’on glande. Et on a des bonnes contradictions et trous d’intrigues à l’intérieur de l’histoire aussi. C'est la fête du slip. Martine à la plage se tient mieux clairement.

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Cliché, qui n'a pas eu son cliché ? Pas cher, le cliché !

Parlons personnage.

Sylvester McCoy reprend son rôle du septième Docteur pour moins de 15 lignes à l’écran. Il ne sert à rien et sa présence (et sa régénération) desservent le film car ça alourdit l’histoire. Mais pour un fan, cela fait plaisir de le voir.

Paul McGann incarne le Huitième Docteur et il fait plaisir à voir. Il a compris le rôle, il est le Docteur, un nouveau et il le fait savoir, tout en étant toujours à l’ouest tout le temps. C’est un des points forts du film.

Eric Roberts, frère de Julia, est le Maître et il surjoue son rôle de grand méchant très méchant. Assez ridicule mais clairement, tout un plaisir vient de là. Avec son look Terminator, on sait pas pourquoi, c’est un des éléments qui fait que l’on continue de regarder.

Grace Holloway, incarnée par Daphne Ashbrook est le love interest du Docteur. Pardon, sa compagne pour l’épisode. Chirurgienne, elle a un début de personnalité intéressante mais qui est plombé par des phrases telles que « maintenant que je rencontre mon grand amour, il doit venir de l’espace… ».

Parce que oui, le Docteur a une romance. Si vous êtes familiers de la nouvelle srie, vous ne comprenez pas le problème. Mais à l’époque, le Docteur était un personnage asexuel. Et le voir bécoter sa compagne, comme cela à l’aise, a hérissé plus d’un à l’époque mais cela vient du traitement de la série par les américains : le héros doit avoir un love interest dans les années 90. Et ce n’est pas qu’à cela qu’on sent la patte de ces années : le gros est un ballot, le policier est neuneu, le scientifique à l’ouest. Bref, c’est cliché-land mais pour notre plus grand bonheur. C’est béta mais ça fait sourire.

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Ah, ce TARDIS. On a beau râlé, on voudrait le revoir...

Pour finir, je vais parler de l’aspect technique. Bon, c’est filmé comme un téléfilm des années 90, rien à dire, ça fait le café mais pas plus. Mais les décors et surtout le TARDIS. L’intérieur a couté un million et ça se voit. Tout dans un style steampunk/gothique, il est magnifique. Clairement, rien que pour cela, je suis content que ce téléfilm ait existé. Et idem pour le costume du Huitième Docteur (et pour l’expliquer, chapeau) : on a la panoplie du gentleman du 19ème siècle. Et enfin, la musique. Le thème a été réorchestré et sonne très bien et la musique est classe et comporte même une chanson de jazz original.

Vous allez me dire que là, c’est carton plein. Et bien, je vais faire mon casse-pied. C’est pas original pour deux sous. On a un voyageur dans le temps, on lui fait une machine du même type que le film La machine à explorer le temps. Et on lui file un costume de cette époque. Car c’est ainsi qu’imaginent un voyageur temporel les américains… Et pour la musique, c’est du classique, vu et revu. Bien mais sans l’once d’originalité que faisait Doctor Who.

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Admirez ce titre, avec un vrai mouvement en 3D avec un titre en 2D

En aparté, quelques mots sur la VF. Elle existe car le téléfilm a été diffusé en 1997 sur France 2 alors que la série n’a jamais été diffusée ou presque en France (6h du matin sur TF1, c’est pas une diffusion pour moi). Bref, j’imagine pas la tête des français face à ce téléfilm au final, ils n'ont dû rien y comprendre…

Bref, cette VF est de très bonne facture. Niveau acteurs de doublage, on a la crème : Pierre Hatet, Céline Monsarrat, Pierre-François Pistorio, etc. sont excellents et bien trouvés pour leur rôle. Les traductions sont hasardeuses (tournevis acoustique quoi) mais tout cela rajoute à cette ambiance si agréable du film. Tout est daté mais sympa.

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Une image promo lambda parce qu'il me manquait encore une transition.

Et cela contribue à et résume bien ce téléfilm : un produit de son époque. Si cela avait duré comme prévu et avait fait une série, ça aurait une catastrophe. Mais vu que les audiences aux Etats-Unis ont été mauvaises, la série ne s’est pas faite. Le Huitième Docteur continuera en romans et audio, de façon magistrale cette fois, Paul McGann ayant été le point à garder de tout cela. Avant de finir en 2013, avec enfin sa scène de régénération que l'on n'a pas pu voir en 2005.

En tout cas, pour ce téléfilm, on se retrouve ici avec un produit unique, où on sent qu’on a voulu faire plaisir aux fans classiques tout en essayant de plaire à une nouvelle population de spectateurs. Et cela rate sur les deux aspects. Trop typé années 90, mal écrit, avec du budget qui passe dans les mauvais trucs (10 000 $ la perruque de McGann). Mais l’essai est louable et mignon à la fois, si bien qu’on finit par aimer, un peu avant d'adorer, beaucoup. Et puis de se réveiller, groggy.

Un épisode de Doctor Who totalement américain et daté mais qui a son charme : cela fait qu’on y revient pour le revoir, de temps à autre. Clairement pas un indispensable mais installez-vous peinard, éteignez votre cerveau et profitez de ce petit bout des années 90 qui est son propre truc.

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