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Les j3ux sont faits
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21 octobre 2007

Berserk

1475

La terre aride et désolée offre sa poussière au vent qui charrie l'odeur âcre et poisseuse d'un sang chargé d'amersmarque marqueregrets.Au dessus de cette désolation, le soleil éclatant sait qu'il ne pourra longtemps résister à l'appel de la Lune,et se résigne à plonger le monde dans des ténèbres qu'on ne saurait imaginer.Sur cette route jonchée de trépassés, chemine la silouhette couleur de nuit de celui qui porte la marque.Poursuivi par les regrets de ceux qui ne sont plus,devant lui ne se dresse qu'une ombre encore plus menaçante, vers laquelle ses pas le poussent inéluctablement.Ceux qui se dressent sur ce chemin sont appelés à rejoindre le flux des âmes tourmentées qui disparaissent dans le néant.La haine se mêle à une tristesse infinie dans le ballet sanglant que constitue une vie perpétuellement à la frange de la mort.Tout ceci n'est il que l'aspect d'un destin aussi cruel qu'imparable, ou au contraire l'espoir qu'un jour,au delà des ténèbres, la lueur de l'espoir apparaîtra?

Nul ne le sait. En tout cas, pour le moment. Bien, cette entrée en matière vous aura au moins mis dans l'ambiance: vous655_2 savez maintenant que je ne vais pas parler d'un univers où de jolies fleurs bleues poussent joyeusement dans les champs tandis que les oiseaux gazouillent allégrement.Rien ne pourrait en effet être plus éloigné du monde sombre dépeint par Berserk. Berserk? Les amateurs de mythologie scandinave auront sans doute tilté sur ce simple mot,je reviendrai cependant sur son origine pour les autres (même si ce mot a fini par passer dans le domaine public). Mais ce dont je vous parle est avant tout un manga très populaire, considéré comme l'une des oeuvres les plus marquantes de la culture japonaise à ce jour. Si Berserk fait moins parler de lui que les aventures d'un certain apprenti ninja en pyjama orange que je me refuse de nommer ici, (vous l'aurez tous reconnu, et non,je n'ai absolument rien contre lui.) c'est qu'il ne s'agit pas d'un manga "grand public".En réalité,ce n'est surtout pas un manga "tout public": classé dans la catégorie Seinen (manga pour adultes,donc),Berserk se destine à un public averti,et croyez moi sur parole,ce n'est VRAIMENT pas conseillé aux âmes sensibles. L'auteur se nomme Kentaro Miura,et Berserk est sa seule oeuvre à avoir véritablement perçé.D'un autre côté,c'est la seule à laquelle il s'est entiérement consacré,et ce depuis son plus jeune âge (le collège en fait). Le manga paraît, comme la plupart, d'abord en pré-publication, par épisodes dans le magazine  Young Animal. Les épisodes sont ensuites rassemblés en volumes reliés,au nombre de 31 actuellement. Berserk est toujours en cours de parution, et nul ne sait actuellement quand la série s'arrêtera, sauf peut être Miura,et encore... Berserk est parfois considéré comme l'oeuvre d'une vie,ce qui suggère que la série pourra durer encore longtemps... Surtout que l'auteur est plutôt avare en révélations ces temps-ci,il est donc difficile de savoir quand l'histoire prendra fin... En France, le 21éme tome est récemment paru, aux éditions glénat; la sortie de cet épisode crucial est une bonne occasion (bon le temps passe vite,j'ai quelques semaines de retard :p) pour ce petit hommage à ce qui est considéré actuellement comme LE chef d'oeuvre du manga Dark Fantasy.

berserk_guts_bottomSe déroulant dans un univers médiéval fantastique, Berserk nous conte l'histoire de Guts, sombre guerrier au destin tragique et à l'épée démesurée...
Les trois premiers tomes constituent une fracassante entrée en matière,en mettant en scène le monde âpre et violent dans lequel Guts évolue; le "guerrier noir" fait d'entrée de jeu étalage de son apparence inqiétante et de son armement monstrueux: arbalète à répétition, bras métallique équipé d'un canon, et surtout, sa fameuse épée (ou plutôt "bloc d'acier",car une arme longue de près de 2m et large de 50 cm à la base, ce n'est plus vraiment une épée), la Dragon Slayer.Autant vous dire que toute personne se dressant devant cette véritable machine à tuer a une chance de survie voisine du zéro absolu...D'autant plus que Guts ne se contente pas de bourriner dans le tas: sa science des armes et du combat est réelle, ce qui signifie qu'en plus de manier une arme titanesque comme si elle ne pesait rien,son talent d'épéiste le rend presque invincible...Il faut dire que le but de cet armement n'est autre que de vaincre les "Apôtres", créatures d'essence démoniaque que Guts poursuit sans relâche, et pour lesquelles il éprouve une haine au delà de l'imagination.Haine qui n'est rien en comparaison de celle qu'il ressent pour un être mystérieux et très puissant nomméill_files46_artcolor Griffith, auquel il semble lié d'une manière particulière...Il faut dire que les créatures des ténèbres (apôtres,mais aussi fantômes et démons mineurs) sont également attirées par Guts, à cause de la "marque du sacrifié" qu'il porte au cou. Tout celà, le lecteur le découvre à travers les 75yeux de Puck,petit Elfe que Guts a sauvé par hasard.Ce personnage assez comique apporte d'ailleurs un peu de détente et de fraîcheur à cet univers sombre et sanglant .Car je l'ai dit et le répète,les combats dans Berserk sont tout sauf aseptisés, le sang gicle,les têtes volent, et l'auteur ne lésine pas sur la tripaille... Inévitablement,la première réaction qu'aura le lecteur à la vue de ces scènes parfois très choquantes sera un certain malaise, voire du dégoût.
Mais une fois cette première réaction passée,on finit par se demander pourquoi, pourquoi et comment un être qui semble humain a pu en arriver à une telle rage,au point de ne plus être mû que par sa haine,mais aussi par sa peur... C'est l'occasion qu'attendait Miura pour faire comprendre au lecteur les motivation de son héros,qui apparaissait jusque là comme un personnage certes charismatique,mais adoptant également une attitude antipathique, voire même égoïste et impitoyable, et qui n'avait aucun complexe à traiter durement ceux qu'il croisait (les non-ennemis,bien sûr,car les ennemis,il se contente de les tuer, sans aucune pitié non plus,d'ailleurs...).La deuxième partie du manga s'attache donc à montrer l'origine de ce que Guts est devenu, au cours d'un très long flash back(connu comme le cycle de "l'âge d'or", du titre des 10 premiers chapitres de cette période), qui s'étend sur près de 10 tomes (les tomes 3 à 13 pour être précis). C'est là que l'histoire prend véritablement corps, nous contant tout l'enfance et la jeunesse de Guts, de sa naissance (où il aurait déjà dû mourir!) aux événements ayant initié sa quête vengeresse,en passant par les nombreux personnages hauts en couleurs qu'il rencontre. Celui qui allait devenir le guerrier noir n'a en effet jamais connu la paix: élevé au sein d'une troupe de mercenaires, cet enfant "porte-malheur" selon certains (il est en effet né d'un cadavre) devra la quitter après avoir accidentellement tué son père adoptif, Gambino, le chef de la troupe.Il errera alors quelques années grif03bcomme mercenaire indépendant, jusqu'à sa rencontre avec un jeune chef militaire nommé... Griffith(ci-contre), et sa troupe de mercenaires à la renomée grandissante: la troupe du Faucon.Enrôlé dans cette troupe, Guts verra et participera à son ascension, tout en dévellopant un aspect "relations sociales" avec ses nouveaux compagnons d'armes, aspect qui était jusqu'alors absent de sa personnalité...  Point d'orgue de cette periode,la relation complexe qu'entretient Guts avec Griffith, tissée de rivalité et d'amitié, en passant peut être par une petite pointe de jalousie et d'admiration; en tout cas on dépasse vite les simples rapports chef/subordonné.Puisque deux persos centraux, ce n'est pas assez, une jeune fille au caractère bien trempé nommée Casca fait également son apparition dans cette180px_Casca_berserk_01 période.Membre des Faucons depuis un certain temps, Casca admire Griffith et bien sûr, n'aime pas les méthodes de Guts avec lequel elle se dispute souvent... Mais tout le monde sait comment évoluent ce genre de relations... :p
Nous suivrons donc au cours de ce cycle la montée de la troupe des Faucons, qui sera portée par son charismatique et ambitieux leader (ambitieux est presque un euphémisme quand on parle de Griffith:  ce dernier est le possesseur d'un pendentif, la béhélith rouge, qui,selon la légende, ne peut appartenir qu'à un homme destiné à diriger la destinée du monde...c'est pourquoi on appelle cet artefact "l'oeuf du conquérant"!) jusqu'au sommet d'une gloire éclatante... Avant de plonger brusquement dans un cauchemar total ,qui s'achève sur un final tragique, dantesque, et apocalyptique, qui était pourtant inéluctable... Le prologue nous en annonçait déjà la couleur,et les prophéties que Guts a entendues au cours de son périple de la bouche de deux êtres aussi surnaturels que mystérieux se révèlent également terriblement vraies... A un détail près toutefois:Guts survit, et de sa douleur mêlée d'une terreur sans nom naît une haine incommensurable...L'histoire nous ramène peu après l'endroit où le prologue nous avait laissés, auprès de Guts qui poursuit sans relâche sa quête vengeresse,se rebellant sans cesse contre l'idée d'un Destin déjà écrit.Les pas du guerrier noir le conduiront cependant jusqu'au retour éclatant d'un certain personnage que je ne nommerai pas pour éviter de spoiler... C'est après cet événement crucial que le manga entre dans sa quatrième grande période, qui s'oriente plus que jamais vers la (Dark) Fantasy, grâce aux nouveaux compagnons de route de Guts.Cette période est encore en cours actuellement, et personne ne peut dire où cette épique saga finira...

122_3Mais ce qui fait la rennomée de Berserk, c'est qu'au delà de la violence et de l'aspect très sombre de l'oeuvre,se cache une histoire particulièrement riche, mature, et incroyablement bien ficelée.Et cette histoire,ce sont ses personnages qui la portent, personnages d'une extrême variété à la psychologie extrêmement travaillée. Ah, je vous sens surpris de l'emploi du mot "psychologie" dans un article qui traite d'une oeuvre réputée gore et bourrine,aspect que je viens d'ailleurs d'évoquer tout au long du paragraphe précédent.Et pourtant,c'est un fait, le succès de Berserk est bel et bien du à son scénario et à ses personnages plutôt qu'à sa violence... D'ailleurs il apparaît évident que le manga n'est pas devenu un monument en ne s'appuyant que sur une suite de scènes choquantes: une simple catharsis, à but de défouloir uniquement, qui deviendrait une référence? Non,même si cet aspect est bel est bien présent dans l'oeuvre, le côté très cru de certaines séquences n'a d'autre but que de donner plus de force à l'histoire, il n'en constitue en aucun cas le noyau. Et puis il faut également rappeler que Miura met en scène un monde qui s'inspire clairement de notre Moyen-Age européen:163_3 pas besoin d'être grand clerc pour associer à cette époque un climat de violence poisseuse, d'insécurité perpétuelle et de cruauté ambiante... Entre la Guerre de 100 ans,les complots à la cour ponctués de viols,meurtres et assassinats,les orgies païennes et les salles de torture, l'auteur n'a, malheureusement, rienbataille inventé...Bon, un féru d'histoire répliquera peut être que les instruments de torture montrés ne sont pas tous contemporains,ou que Miura a mélangé plusieurs époques dans le design des armures et des châteaux; d'un autre côté,ce n'est pas un manga historique, mais une histoire de fantasy, qui ne fait que s'inspirer de faits réels.(d'ailleurs l'auteur a montré dans ses interviews un grand interêt pour la vision qu'avaient les européens de Berserk,qui contient en partie le point de vue d'un Japonais sur notre moyen âge.)Bon, loin de moi l'idée de glorifier l'aspect gore de Berserk; d'ailleurs l'auteur adopte dans le manga un point de vue assez neutre sur les horreurs qui y sont dessinées,laissant le lecteur se forger sa propre opinion...Les notions de "bien" et de "mal" n'ont d'ailleurs pas vraiment leur place dans un univers aussi sombre, qui ne s'oriente pas sur la figuration de ces scènes en elles mêmes, mais plutôt sur l'évolution de personnages extrêmement humains et réalistes,confrontés à cet univers.L'humanité,c'est bien ce qui caratérise les personnages principaux de Berserk (même si certains ne sont plus tout à fait des êtres humains...).

266800_250Par exemple, Guts est certes le héros de l'histoire,mais ce n'est pas un enfant de choeur; d'un autre côté le cycle de l'âge d'or nous fait bien comprendre,sans lésiner sur les séquences dures(cf premier chapitre du Tome 4) qu'une telle sauvagerie associée à une maîtrise des armes qui semble inhumaine est née d'un contexte de survie. Survivre,c'est bien là un des aspects les plus importants de la mentalité de Guts: avant tout, il n'est qu'un homme qui refuse la mort de toutes ses forces (dificile de trouver comportement plus humain),même et surtout si il doit y faire face. Paradoxalement, lui qui a survécu d'inombrables fois à des situations presque désespérées,qui s'est remis de toutes ses blessures continue encore et toujours d'aller au devant de cette mort qu'il craint tant, comme si l'affronter était pour lui un exutoire à sa peur...De plus, son âme de guerrier, née du fait qu'il n'a connu que les champs de bataille depuis sa naissance,n'envisage jamais d'arrêter un combat avant que l'un des adversaires ne tombeill_files39_artcolor en miettes; ce n'est donc pas demain qu'il va se poser dans un endroit calme et fleuri et ouvrir un petit commerce! Blague à part, notre berserker est également un personnage assez tragique,au sens premier du terme:soumis aux caprices du destin, ayant connu une vie plus sombre que n'importe qui,il ne cesse de se rebeller contre cette fichue destinée en laquelle il refuse de croire,même lorsque tout ce qu'il a subi semble clairement le résultat d'un plan pré-défini,qui lui avait d'ailleurs déjà été annoncé. Mais "ironiquement", sa propre mort qui faisait partie de ce destin n'a pas eu lieu... Ce qui accentue d'autant plus son idée d'un destin injuste, d'ou sa rébéllion... Lisez le tome 13, et vous comprendrez mieux: une belle scène d'apocalypse, rien de tel pour un bon petit traumatisme... heum... bref.
Ajoutons que Guts a beau être une sorte de guerrier ultime et presque invincible, il n'en est pas moins totalement humain physiquement, et ce n'est pas parce qu'il se rebelle contre la destinée qu'il échappe pour autant à sa condition de simple mortel.En clair,son 11invincibilité ne vient pas d'un quelconque pouvoir surnaturel,il ne se transforme pas en super-combattant,ne fait pas des bonds de 50 mètres suivis d'un quintuple saut périlleux arrière et ne lance pas des boules multicolores plein partout...Tout au plus est il un peu plus endurant que la moyenne,possède une musculature à faire passer Stallone pour une femmelette,et bon,il bouge pluôt vite malgré son équipement lourd. Mais ses capacités ne viennent que d'un entraînement quasiment continu,marqué par la volonté de se dépasser sans cesse...En totale opposition avec ses adversaires Apôtres qui prennent leur forme démoniaque dès qu'ils commencent à saigner un peu...Ainsi, Guts se surpasse et s'améliore au fil de son épopée; il n'est certes devenu guerrier que parce que c'est la seule chose qu'il ait jamais appris à faire, cependant, on perçoit au fil de ses combats incessants une volonté (ou une obligation) de dépasser ses limites.
Comme quoi un personnage qui semble au premier abord une brute du style "taper d'abord,poser les questions après" nous révèle en fait une personnalité complexe, qui ne fait que renforcer l'attachement du lecteur au personnage,et donc l'implication dans l'oeuvre.
De la même façon,la relation entre Guts et Griffith, cette amitié qui se transforme en une haine féroce de la part de Guts,21 (et une certaine indifférence de la part de Griffith) est un élément fondamental de l'histoire.Tout repose sur l'opposition complète qu'il y a entre les deux personnages: 07Guts, plus grand et musculeux,donne vraiment l'impression de n'avancer que par la force, alors que Griffith est beaucoup plus fin, tant par son design presque androgyne que son côté calculateur.Alors que Guts rampe dans le sang et fait le sale boulot, Griffith utilise ses succès pour s'élever au faîte de la gloire.Cependant, si Griffith est érudit et Guts, sans doute illettré (savoir lire ,ça ne sert à rien sur un champ de bataille), Guts est loin d'être stupide,et si il n'a pas la vision tactique et calculatrice de Griffith, il peut sans problème réfléchir sur lui même pour aboutir à des conclusions pas si éloignées dans la forme de ce qu'aurait pensé Griffith...
Quand un être brutal et associal rencontre un tacticien et bretteur génial, vénéré par ses hommes, qu'obtient on? Et bien, les contraires s'attirent n'est-ce pas? Effectivement, si il est clair que Griffith voit Guts avant tout comme un moyen pour réaliser ses ambitions, il en fait rapidement un élément fondamental de la troupe du faucon,mais aussi son confident;il lui accorde de plus une confiance absolue.Et l'influence de l'un sur l'autre est réelle, puisque si Griffith devient plus impulsif en présence de Guts (ce qui a le don d'énerver Casca), Guts finit par, à force d'écouter le "faucon blanc" vouloir trouver lui-même sa propre voie, même si il agit au détriment d'un autre pour cela; il n'agit ni plus ni moins que comme "l' ami" décrit par Griffith ("celui à qui on ne doit pas imposer sa vue, et qui a le courage de s'opposer à quelqu'un pour cela,même si ce quelqu'un s'avérait être moi...celui-là est un véritable ami... il est mon égal").Mais le désir d'indépendance de Guts sera perçu comme une trahison par Griffith,ce qui sera en partie responsable de la chute de ce dernier...

Tout ceci n'est qu'un apperçu non exhaustif de la richesse des personnages de Berserk,qui ne sont peut être pas tous écrasants de charisme, mais profondéments réalistes,avec leurs désirs souvent obscurs et leurs sentiments vacillants au coeur du chaos ambiant.Entre un roi noyant ses instincts coupables et sa tristesse en se dévouant à son rôle,une soldate de l'Inquisition dont la foi fervente n'est qu'un rempart illusoire face à ses peurs et ses pulsions un brin sado-masochistes, ou encore un gamin débrouillard,voleur, et plein d'enthousiasme, Berserk nous propose un vaste panel de personnalités marquées,et certains personnages secondaires ne sont pas en reste...En tout cas,hors de question pour Miura de concentrer son histoire autour du seul perso principal, même si tous les intervenants n'ont bien sûr pas la même implication.

14_15Si Berserk a acquis au fil des ans une grande renommée parmi les fans de mangas,c'est que le graphisme de Miura a considérablement évolué au fil du temps,jusqu'à devenir l'un des plus détaillés et des meilleurs que l'on puisse trouver.L'évolution est particulièrement remarquable au niveau du chara-design:il suffit de comparer les tomes 1 à 20 pour constater l'amélioration flagrante du design de Guts,par exemple.Si le design des premiers tomes est assez sommaire,(surtout celui des personnages),la qualité du dessin augmente sans cesse au cours de l'histoire. Décors et visages sont ainsi devenus extrêmement détaillés,rendus avec une précision à couper le souffle, qui n'est absolument pas handicappée par le support noir et blanc; en fait,c'est même plutôt l'inverse...Miura affectionne particulièrement les dessins d'ensemble,et il n'est pas rare de tomber sur un dessin double page montrant une vue aérienne d'un champ de bataille,ou même d'une quelconque forteresse dominant les vastes étendues en contrebas.Quelle que soit la scène représentée,le style particulier de Miura touche toujours juste,et transmet à la perfection l'émotion que l'auteur a voulu y mettre: révolte devant un massacre injuste,souffle épique d'une bataille sanglante, écoeurement devant la barbarie de l'Homme envers ses semblables, ou paix et sérénité... (il en faut bien un peu dans ce monde de brutes!)De plus, l'auteur pervient à rendre parfaitement l'illusion du mouvement lors des batailles en "floutant" légèrement les zones en mouvement, voire même en superposant sur la même image plusieurs étapes d'une même action rapide... La technique de Miura est considérée par certains fans comme la plus aboutie au monde, toutes bandes dessinées confondues.C'est peut être un peu éxagéré,d'autant que ce style très réaliste ne peut être comparé avec certain auteurs ayant recours à des dessins totalement fantaisistes...Je vous laisse vous faire votre propre opinion en la matière,les goûts artistiques sont particulièrement subjectifs.Toujours est il que Miura connaît véritablement son affaire, aussi à l'aise pour dépeindre un champ de bataille qu'une scène de sexe, un décor de taverne qu'une fête au palais du roi, un démon hideux pourvus d'organes externes placés aléatoirement qu'un adorable petit lapin rose tout mignon tout gentil (ah, non,ça,y'a pas...) ...

lieux_dimensionMais un grand nombre de dessins dans Berserk sont tirés d'influences diverses: il est de notoriété publique que Kentaro Miura possède une vaste collection d'images en tout genre,et qu'il n'hésite pas à s'inspirer de tel ou tel château médiéval pour ses forteresses, ou même de tableaux plus ou moins récents. Je vous conseille ces dossiers pour vous faire une meilleure idée, sur apresleclipse.net (site plutôt complet sur berserk que je recommande chaudement,au passage), qui référence également d'autres allusions. Notez que quelques spoils minimes peuvent se trouver sur ces pages (et des spoils majeurs sur certaines autres; mais pas trop sur les dossiers "inspirations").Comme vous pourrez le constater, les influences et allusions que fait Miura,et qui ne doivent rien au hasard,sont particulièrement nombreuses; certains fans passent leur temps à décortiquer les volumes à la recherche de la moindre allusion...Notez cependant que les inspirations les plus importantes sont la série de romans de fantasy (candidate au guinness book pour la plus longue saga de fantasy,avec quelques 80 tomes parus) Guin Saga, de Kaoru Kurimoto , et les oeuvres de deux pionniers du manga: le maître Ozamu Tezuka (Dorodoro (dont l'histoire présente quelques similitudes avec Berserk),le roi Leo,Phénix l'oiseau de Feu...), et Go Nagai, à qui l'on doit Goldorak...
vierge_fer01D'autre part, outre les influences littéraires et artistiques, Berserk s'inspire également de l'Histoire médiévale européenne; cependant la série évoque des armes,techniques et costumes répartis du Xéme au XVIéme siècle... Autant dire que la tranche est vaste; si la pluprt des fans s'accordent à dire que la présence des premiers canons et l'achèvement d'une guerre de 100 ans situeraient globalement l'histoire vers le début du XIVéme, les costumes de la cour royale,et certaines armures très ouvragées sont issus de périodes ultérieures. Comme je l'ai dit plus haut,Berserk n'est en aucun cas un manga historique.Mais l'évocation de nombreux thèmes souvent associés à l'époque médiévale laisse entendre qu'il y a tout de même pas mal de documentation derrière...Une coïncidence amusante: un chevalier mercenaire allemand du XIVéme siécle, nommé Goetz von Berlichingen  ,surnommé "Goetz main d'acier" portait une prothèse métallique en forme de main; ce dernier est connu pour avoir aidé une révolte de paysans contre un seigneur tyrannique... Cependant, Miura n'a absolument pas prémédité la ressemblance entre son héros et ce chevalier. Notez également que la religion en vigueur dans ce monde se rapproche fortement de la religion chrétienne, telle qu'elle était à l'époque,c'est à dire livrée avec inquisiteurs, bourreaux, bûchers et salles de torture, aspect très développé dans les tomes  17 à 20.
Le titre Berserk s'inspire quand à lui des Berserkir de la tradition scandinave, à savoir des guerriers entrant dans une transeguts_pas_content guerrière qui en fait des combattants enragés,insensibles à la douleur et à la peur,trucidant tout ce qui ose se pointer à portée d'épée, ami ou ennemi. On suppose qu'au delà des guerriers à la force animale décrits par les légendes, les berserk étaient tout simplement des guerriers d'élites que les "mages" des tribus nordiques droguaient pour provoquer en eux cette explosion de brutalité.Toujours est il que l'état de berserk,popularisé par la littérature et les jeux de rôle, colle dans le manga parfaitement à l'attitude de Guts lors de ses combats les plus intenses, au cours desquels sa haine,sa rage et ses réflexes prennent entièrement le contrôle de son être...Etat encore accentué dans les derniers tomes par un artefact appelé l'armure du Berserk,qui augmente grandement les capacités du porteur mais le rend enragé, et constitue pour lui un danger mortel. Autre référence aux mythes nordiques,le royaume où se déroule la mjorité de l'action se nomme le Midland, ce qui n'est qu'un anglicisme à partir du nom Midgard, le "Terre du Milieu", ou monde des hommes.
ill_files18_artcolorMais les références peuvent également être des clins d'oeuil humoristiques,et le personnage le plus qualifié pour cela,c'est bien entendu Puck l'Elfe! Il apparaît ainsi au cours de désopilantes scènes en SD, lors desquelles il adopte des formes diverses, notamment celle de Maître Yoda, ou encore de héros de vieilles séries japonaises...Un peu d'humour,qui ne fait pas de mal à une série qui serait bien trop noire sinon! (d'ailleurs l'intéressé le dit lui même: "si je n'étais pas là,cette histoire serait beaucoup trop sombre!")

Pour finir, une évocation inévitable des produits et productions dérivés du manga. Pour commencer, une série animée à été produite en 1997 (et sortie en france en 2002!); cette série, extrêmement fidèle àberserk l'oeuvre originale, se concentre sur la période de l'âge d'or,plus particulièrement sur l'épopée de la troupe du Faucon.Bien que de bonne facture, la série animée accuse son âge,les dessins en sont un peu vieillots,et assez statiques.De plus l'animé réalise quelques simplifications par rapport au manga, en supprimant plusieurs personnages, qui ne sont pas essentiels à la période traitée.En général, l'animé est considéré comme une bonne initiation à l'univers de Berserk; le 24éme et dernier épisode s'achève de façon assez frustrante, ce qui incite à la découverte de l'oeuvre de base, bien plus complète,et surtout,qui raconte la suite!Cependant les fans du manga ayant regardé l'animé après lecture se sont souvent retrouvés un peu déçus par une adaptation qui oublie tout de même quelques menus détails...Cependant la trame générale est globalement la même,c'est à dire une histoire en béton portée par des personnages réalistes et attachants.
game_ps2_gameplay2Comme l'animé,ça ne suffit pas, Berserk s'est également vu adapté en jeu vidéo. Deux jeux ont vu le jour,le premier, Sword of the Berserk: Guts' rage sur Dreamcast prend place peu après les évènements du tome 13: il propose de suivre les aventures de Guts sur une période non traitée dans le manga: si l'histoire prend quelques libertés avec la série, elle est néanmoins très travaillée, mise au point par Kentaro Miura lui même.
Le deuxième jeu est sur PS2; son histoire démarre au tome 22 du manga,et suit la trame de Miura (à quelques détails près) jusqu'au tome 30 environ.Ce jeu n'est sorti qu'au Japon,pour la raison évidente que le tome 22 n'était pas (et n'est toujours pas,à l'heure où j'écris ces lignes) sorti chez nous.
Ces deux jeux sont de type Hack'n'slash. En clair,les phases de jeu15 consistent principalement à avancer d'un point à un autre en bourrinant du monstre.
Quand aux autres produits dérivés,figurines et artbooks ont bien sûr envahi les magasins spécialisés japonais; ils restent cependant difficiles à trouver chez nous...En tout cas, l'engouement pour Berserk est réel,on peut le voir au travers des excellents résultats du manga et de ses produits dérivés.

Pour conclure... et oui, il est temps de conclure ce ballet sanglant auquel je vous ai invités, à la découverte d'un Seinen Dark Fantasy ne manquant pas de caractère: Berserk! Nous avons vu que derrière l'aspect violent qui semble le qualifier, l'univers de Berserk est en réalité riche d'un scénario extrêmement mature et travaillé,qui provoque un maëlstrom d'émotions chez le lecteur...émotions passant comme une lettre à la poste grâce au style recherché de Kentaro Miura,considéré comme l'un des meilleurs mangakas actuels.Difficile de rester indifférent à ce monument qui fait date dans l'histoire du manga!Le seul reproche que l'on pourrait lui faire,c'est qu'après s'être plongé dans un univers aussi prenant et détaillé, de nombreux autres mangas peuvent sembler bien fades... La tentation de comparer est grande, et même les autres Seinens de Dark Fantasy (actuellement, Claymore et Ubel Blatt font pas mal parler d'eux) souffrent de la comparaison avec le "chef d'oeuvre" incontestable du genre. Fort heureusement, de nombreux genres différents paraissent,qui peuvent se révéler tout aussi passionnants,sans souffrir d'une comparaison facile.
En bref,si vous avez le coeur bien accroché,que vous aimez la Fantasy et que vous ne connaissiez pas encore,plongez-vous sans plus attendre dans ce monde aux limites de l'Enfer... un univers qui vous Marquera... à jamais.

berserk_wp20_1024

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