Japan expo 2009: compte-rendu de la conférence CLAMP

Le samedi, eut lieu l’Evénement de cette Japan Expo, celui qui à lui seul justifiait les innombrables sévices que nous avons dû subir ; citons, en vrac, la tendance des agents des transports parisiens à arrêter le service au pire moment, une expérience plus que réaliste nous plongeant dans la peau d’une sardine à l’huile, suivie d’un parcours du combattant interdisant l’agoraphobie, pour accéder, enfin, aux objectifs fixés… Mais la récompense fut à la hauteur : il ne s’agissait, ni plus ni moins, que de la conférencedes CLAMP ! Invitées d’honneur du salon, les quatre membres du plus célèbre des studios de mangas ont reçu un accueil triomphal de la part de leurs fans français, et ont dédicacé du jeudi au samedi. Bien sûr, le système de dédicaces par tirage au sort en aura frustré plus d’un ; non seulement la queue était monstrueuse, mais en plus, peu ont eu la chance inestimable de rencontrer les artistes en face à face, histoire de pouvoir faire baver les autres Otaku en leur montrant la quadruple signature sur un manga ou un artbook. Heureusement, la séance de rattrapage, ouverte à tous, était la conférence : les quatre mangaka y répondaient aux questions de leurs fans, qui ont été transmises via le site de la Japan Expo.

Rappelons rapidement, comme cela a d’ailleurs été fait en début de conférence, l’origine, l’identité, et la bibliographie de ce studio plus que légendaire, qui fête déjà ses 20 ans. Les quatre membres actuels et permanents de CLAMP sont Satsuki Igarashi, Nanase Okawa, Tsubaki Nekoi, et Mokona (qui dirige le studio). Elles ont commencé, comme presque tous les mangaka, par travailler sur des fanzines, où elles réalisaient des doujinshi (ou mangas amateur, si vous préférez). Leurs premières réalisations professionnelles datent de 1989, avec RG Veda (titre que l’intervieweuse ne savait d’ailleurs pas prononcer correctement :p). Très prolifique, le studio a ensuite enchaîné œuvre sur œuvre, devenant de plus en plus populaire au fil des années : citons donc, de façon non exhaustive, les cultissimes Tokyo Babylon (1990), X (1992), Card Captor Sakura (1996), T.r.è.f.l.e (1997), Chobits (2001), et, naturellement, les deux derniers : Tsubasa Reservoir Chronicle et xxxHolic (2003). Ces deux séries, très liées, sont de loin les plus populaires du studio, comme en a témoigné l’ovation du public à l’énoncé de leurs titres. Notez qu’ici, je n’indique que les dates de démarrage des séries ; actuellement, Tsubasa et xxxHolic sont toujours en cours ; et la fin de X, pourtant proche, n’a toujours pas été publiée. Enfin, Kobato, la série la plus récente du studio, démarée en 2005, sera bientôt publiée en France. Les CLAMP ont également réalisé des travaux de chara-design : tous les personnages de l’anime Code Geass , ainsi que le costume de l’un des protagonistes du jeu Tekken 6 sont de leur fait.
Difficile d’être un Otaku sans avoir entendu prononcer l’un de ces noms ; on comprendra mieux alors l’engouement pour CLAMP, et l’importance que prenait cette conférence aux yeux des fans. D’autant plus que les CLAMP sont très peu sorties du Japon, du fait de leurs exigences professionnelles ; on les a déjà vues quelquefois aux Etats-Unis, et elles avaient foulé une première fois le sol français, à Angoulême, pour une présentation de leurs œuvres.

Quid de la conférence en elle-même ? Pour le public, il y avait très peu de sièges près de la scène, mais la capacité de l’amphi du hall 5 du parc des expositions était largement suffisante pour accueillir tous les fans… On en sera quitte pour s’asseoir par terre, après tout les trois écrans de la salle et les hauts parleurs corrects permettaient largement de suivre la conférence. Après la présentation d’un AMV nommé « CLAMP in wonderland », reprenant les personnages des adaptations animées des mangas de devinez-de-qui-je-parle, (notez là encore, l’ovation du public lors de l’apparition des personnages de Tsubasa), nos quatre mangaka ont été introduites comme je l’ai décrit plus haut. Vint ensuite le jeu des questions ; on a retrouvé bien sûr les questions généralistes, sur l’origine du studio, la répartition des rôles lors du travail, leurs sources d’inspiration, ou le moment de leur carrière qu’elles ont préféré (évidement, une fois que ses collègues eurent évoqué la première publication « professionnelle » de leurs œuvres, Mokona n’a pas pu s’empêcher de dire « comme elles ont dit tout le reste, pour moi ce sera d’être présente ici, à la JE ! » Effet sur le public garanti…). Et au sujet des scènes de baisers, soi-disant absentes chez CLAMP (alors que toutes leurs œuvres contiennent des love stories) : « Elles sont bien présentes, relisez mieux… mais peut être qu’elles sont trop petites du point de vue des français ! »  Des questions bien plus pointues et intéressantes sur leurs œuvres ont tout naturellement suivi ; certaines réponses étaient particulièrement attendues… Ce que l’on retiendra : La suite et fin de X est déjà scénarisée depuis longtemps, et SERA inévitablement publiée en manga… mais pour le quand, c’est une autre histoire, que les CLAMP ont refusé de nous conter… Quand aux zones d’ombre dans les fins de Card Captor Sakura et T.r.è.f.l.e, elles seront, nous dit-on, levées dans une autre « œuvre » qui expliquera enfin ces deux aspects des univers de CLAMP. Quand aux liens et passerelles entre les différentes séries du studio, elles tiennent, selon les auteures elles-mêmes, autant de clins d’œil personnels que de véritables cross-over… mais cela dépend également des séries. (Il est évident dès le premier tome que Tsubasa et xxxHolic sont en cross-over permanent) Aux fans de départager ce qui est important et sous-entend que deux séries se déroulent dans le même univers des petit clins d’œil placés sans prétention. Enfin, le clou du spectacle a été la réalisation par les quatre femmes, sur scène et en direct, d’un dessin original ! Celui-ci représentait Yuko et Watanuki, les personnages principaux de xxxHolic, accompagnés des Mokona noir et blanc, mascottes du studio, nommés d’après la directrice, évidemment. Bien qu’impressionnées, et placées dans des conditions plutôt atypiques, les CLAMP ont réalisé un travail remarquable qui a été abondamment salué par le public.
La surprise finale a été pour les quatre mangakas : leur amie Yui Makino, chanteuse ayant interprété l’un des génériques de l’anime Tsubasa Réservoir Chronicle et seiyuu (doubleuse) du personnage de Sakura dans cette même série, a été invitée sur scène par le staff! Cette dernière s’est vu confier la tâche difficile d’interpréter en public, une réplique de Sakura, avec sa voix de doublage… Après quelques discussions entre les CLAMP et Yui, c’est sur une phrase que Sakura n’a jamais prononcé ni dans les mangas, ni dans l’anime, que le choix s’est arrêté… phrase toute simple qui était clairement destinée à faire plaisir aux fans : « Shaolan-kun, DAISUKI ! (L) » (avez-vous vraiment besoin que je vous dise que cela se traduit par « Shaolan, je t’aime ! »). Encore une fois, l’ovation a été retentissante… et les grands romantiques que nous sommes ne pouvons qu’espérer lire, puis entendre cette phrase, directement dans la série !

Et vint le moment de se séparer… Gageons que l’expérience a été enrichissante, tant pour les fans présents que pour le studio, qui n’a pu qu’être motivé par les encouragements de ces personnes d’un pays si différent… et pourtant plus gros consommateur de mangas, juste derrière le Japon. L’architecture parisienne a d’ailleurs fortement impressionné notre équipe, et il est possible qu’une ville ressemblant à notre belle capitale polluée soit représentée dans une future série. Cette conférence n’a pas bouleversé l’univers des Otaku par des annonces tonitruantes, mais s’est avérée un moment d’une rare intensité. Il était prévisible que CLAMP ne donnerait pas la clé ultime de tous ses univers, c’est toujours bien plus intéressant de laisser les fans en discuter par eux-mêmes… pas de révélations fracassantes, donc, mais des promesses qui seront tenues dans les prochaines années… espérons, avant le trentenaire du studio!