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Les j3ux sont faits
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7 janvier 2020

La pièce d’Harry Potter à Londres : bon plan ou arnaque ?

harry-potter-and-the-cursed-child-artwork

Je suis une grande fan de l'univers d'Harry Potter depuis de nombreuses années. A ce titre, lorsqu'ils ont annoncé qu'une pièce allait être produite et jouée, j'ai alors été très curieuse de voir ce que visuellement ça pouvait donner. Je dois avouer que la lecture de la pièce avait quelque peu douché mon enthousiasme, mais début 2019, avec la sortie de la bande originale, mon intérêt a été ravivé. Lorsque des amis m'ont proposé de se cotiser pour mon cadeau d'anniversaire, je me suis dit que ça pourrait être l'occasion d'aller enfin découvrir ce bout de l'univers Harry Potter que je n'avais pas encore exploré visuellement.

Quand je parle de «se cotiser », je ne plaisante pas. La pièce est assez chère, même selon les critères londoniens. Les premiers prix sont à 42£ (environ 45€) et si vous voulez la voir en entier, il faudra débourser 2 fois cette somme car elle est en 2 parties (qui durent chacune environ 3h).
Malgré le prix et la longévité de la pièce (elle est à l'affiche depuis 3 ans et demi), elle a toujours beaucoup de succès et mieux vaut réserver plusieurs mois à l'avance vos billets. On se rend compte de la popularité de la pièce quand on arrive pour passer la sécurité. Il nous est conseillé d'arriver sur place 1h avant et même si la file avançait vite, j'ai dû faire la moitié du tour du théâtre avant de rentrer !

Dans la salle, je suis haut, très haut ! 3 étages à monter plus une volée d'escaliers pour arriver à ma place, à l'avant dernier rang. Certains des autres spectateurs lâchent un petit juron en voyant le dénivelé sous nos sièges (je déconseille aux personnes ayant le vertige de prendre des places dans le dernier balcon) ! Visuellement, on voit tout un peu biaisé et une partie du décor est coupé même si on s'en sort plutôt bien. Je suis contente d'avoir pris des jumelles. Elles m'ont permis d'apprécier certaines scènes « posées », surtout quand les acteurs lèvent la tête.
J'étais prévenue qu'il y aurait peu de places pour mes jambes, mais mon petit 1m63 s'en est grandement contenté.
La pièce commence sur le quai de la voie 9 ¾, en reprenant quasiment mot pour mot l'épilogue du tome 7. C'est à peu près le seul détail que je donnerai sur l'intrigue en elle-même afin de ne pas spoiler ceux qui ne l'ont pas lu et voudraient voir la pièce.

image CC

J'avais de grandes attentes sur la façon dont ils arriveraient à mettre en scène la magie et je dois dire que je n'ai pas été déçue. Je m'y connais peu dans le domaine, mais il me semble qu'un certain nombre des effets spéciaux sont réalisés en se basant sur la prestidigitation. On se doute qu'il y a des trappes pour faire apparaitre et disparaitre des personnages ou pour les scènes de métamorphose mais je n'en ai pas vu une seule. Le fait d'être sur scène sans post-production implique également de faire une magie moins tape à l'œil qu'au cinéma. Je trouve que dans les derniers films de l'univers Harry Potter, la magie est presque trop présente. Elle y est utilisée pour un oui ou pour un non et les effets toujours plus flamboyants. Là, pas question d'essayer de faire un sort sans le nommer car sinon il passerait inaperçu. On ne peut pas non plus utiliser la magie à tout va alors que des moyens plus « humains » peuvent être utilisés car ce serait trop lourd à mettre en scène ! Cette sobriété magique n'empêche tout de même pas un combat de qualité entre 2 sorciers, la résolution d'une énigme magique à base de livres féroces et des voyages dans le temps visuellement bien marqués.

Un bel effort a été mis sur la mise en scène. La scène centrale tournante est un atout certains pour faire apparaître un peu de magie et changer de scènes en douceur. Beaucoup d'accessoires sont multi-tâches et permettent d'éveiller notre imagination tout en gardant une sobriété sur scène. Pas d'énorme structure pour le Poudlard Express, pourtant on se croirait dedans ! J'ai aussi beaucoup apprécié l'apparition de Mimi Geignarde bien qu'elle soit très consistante pour un fantôme.

L'atout principal de la pièce, de mon point de vue, est l'atmosphère créée. Elle est mouvante en fonction du contexte et elle est très joliment accompagnée par une bande originale d'Imogen Heap. La première partie se clôt sur une ambiance lourde et pesante, avec le retour des détraqueurs. Ils sont visuellement très impressionnants et lorsque l'un d'eux s'est avancé vers moi (alors que j'étais très éloignée de la scène), je me suis un peu tassée dans mon siège. Je crois que c'est la création de cet univers qui m'a fait préférer la première partie à la deuxième, qui est elle plus concentrée sur la résolution de l'intrigue.

imogen heap

L'intrigue, c'est justement là que le bât blesse. Je le savais avant de voir la pièce, mais l'histoire n'est pas plus sympa parce qu'elle est sur scène que lorsqu'on la lit. Pour ceux qui n'auraient pas suivi, l'histoire est remplie d'incohérences par rapport aux livres Harry Potter, que ce soit dans l'utilisation de la magie ou dans la psychologie des personnages. Avant d'aller voir la pièce, j'étais d'accord pour dire que l'histoire ressemble plus à une fanfiction qu'à un travail poussé d'auteurs. Je n'ai pas changé d'avis à ce sujet. Certaines incohérences sont même ressorties, soit parce que je les avais oubliées, soit parce qu'à l'écrit elles choquent moins. Par exemple, le fait que tout le monde dise « Voldemort » alors que dans les livres, même plus de 10 ans après sa défaite, à part quelques irréductibles, tout le monde dit « Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom » ou « le Seigneur des Ténèbres » pour ses partisans. Ce n'est pas grand-chose, mais ça a tendance à m'écorcher les oreilles à chaque fois. De même, la plupart des « anciens » personnages ne sont que la caricature d'eux-mêmes. Ron ne sert pas à grand-chose à part faire une vanne de temps en temps, Hermione râle après tout le monde en temps que super chef et Harry est paumé, n'écoute personne, mais comme par hasard à la fin, c'est lui qui sauve la mise. Le seul qui s'en sort bien, c'est Drago qui devient plus humain.

Je ferai également deux reproches à la mise en scène. Le premier est que pour réaliser les effets spéciaux, beaucoup de scènes sont assez sombres. C'est parfois un peu dommage car lorsqu'on est loin, des personnes ou des objets noirs sur des fonds sombres, c'est loin d'être l'idéal. Le deuxième est que le décor du lac était hors champ en ce qui me concernait. J'entendais ce qui se passait, j'ai vu les acteurs apparaitre au bord de scène trempés donc j'ai supposé qu'il y avait vraiment quelque chose de sympa à voir, mais ça restera une supposition !

interieur HP CC

Enfin, je ne sais pas si c'était un choix délibéré ou pa,s mais il se trouve que l'acteur que j'ai vu dans le rôle de Scorpius avait une voix assez aigüe. Ça lui donne un côté fragile qui est cohérent avec le personnage. Lorsque j'avais lu la pièce, je l'avais imaginé un peu suffisant, à la façon de son père dans sa jeunesse et clairement, ça ne collait pas. Le souci, c'est que j'ai souvent eu l'impression qu'on en profitait pour lui donner un côté pleurnichard et efféminé et là, on tombe dans la caricature. Ça créé quelques situations comiques, mais ça rend certains éléments de l'histoire encore plus incohérents voir un peu dérangeants. Avec cette interprétation, j'ai beaucoup mieux compris les reproches de queerbaiting qui ont été faites à la pièce.

J'ai passé un très bon moment au théâtre à voir Harry Potter et l'Enfant Maudit (Harry Potter and the Cursed Child comme ils disent de l'autre côté de la Manche), mais je ne la recommanderais pas à tout le monde. Si vous êtes fan d'Harry Potter (et que malgré la dernière déclaration de JK Rowling vous acceptez "d'investir" dans l'univers HP), il faut que vous soyez capables de passer outres les incohérences dans l'univers. Une fois ce (gros) détail passé, la découverte d'une nouvelle interprétation du monde magique devrait vous charmer. Pour les simples curieux, je vous conseillerai de choisir une place moins éloignée que la mienne de la scène pour vraiment profiter visuellement de l'ensemble, quitte à ne voir que la première partie.
Dans les deux cas, ne comptez pas sur le marchandising dans le théâtre pour garder un souvenir de la pièce. Visuellement, ce n'est pas très beau et là encore, ça fait plutôt mal au porte-monnaie !

front theater

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