The Haunting of Hill House, un drame familial déguisé en série d'horreur

Bizarrement, quand Netflix a mis en ligne la série The Haunting of Hill House, j'ai eu le droit à plusieurs mails de rappel que ça pouvait m'intéresser. Sans dec. Il ne fallait pas être devin pour se douter qu'une série fantastique avec des fantômes allait attiser ma curiosité. Mais les séries d'horreur, c'est souvent pas terrible, très inégal, et un peu trop classique. La frousse, ça s'émousse vite...

Le matériel d'origine, c'est un bouquin de Shirley Jackson, une incroyable auteure de romans fantastiques et d'horreur. J'avais déjà adoré (mais alors A-DO-RE) l'adaptation la plus récente de cette oeuvre, le fameux et délirant The Haunting (avec Liam Neeson et Catherine Zeta-Jones), qui s'éloigne pourtant beaucoup de l'oeuvre d'origine. Du coup, je me doutais un peu que l'ambiance de cette série allait me plaire... Même si, il faut savoir que The Haunting of Hill House - la série n'est pas à proprement parler une adaptation du livre. Qu'on soit clair : il s'agit plutôt d'un hommage, qui reprend le nom de quelques personnages, la base de la mythologie, et c'est à peu près tout. Les fans du livre, ou bien ceux qui comme moi apprécient les deux premières adaptations réalisées retrouveront donc plein d'éléments, de clins d'oeil, mais en aucun cas ne sauront dès le début comment se terminera l'histoire.

Il s'agit d'une histoire de maison hantée on-ne-peut-plus classique. Vraiment. On a le droit à du jump scare bien comme il faut, à des enfants cachés sous les lits, des murs qui tremblent, des portes qui claquent, des gens qui deviennent fous, qui voient des choses du coin de l'oeil... Rien de bien original là-dedans. Sauf que la série The Haunting of Hill House porte l'exercice à un autre niveau. Parce que ce qui nous intéresse ici, ce n'est pas tant l'histoire des fantômes que l'histoire de la famille qui vit dans la maison hantée. La construction narrative est vraiment très intelligente : on suit les personnages en parallèle dans deux époques, et chaque épisode est centré sur le point de vue de l'un des personnages. Au fur et à mesure que la série avance, on commence à compléter le puzzle et à reconstituer les événements qui se sont déroulés dans le passé, et du coup, à comprendre l'histoire dans sa globalité. Honnêtement, j'ai trouvé cette construction narrative, à mi-chemin entre le Ça de Stephen King et la série This is us, extrêmement intelligente et adaptée.

Ce qui est vraiment malin, c'est que la série ne se contente pas de nous faire peur avec ses fantômes. Oh, ne vous y détrompez pas, il y a maintes occasions de se faire peur, avec des apparitions inquiétantes, des présences malsaines, des petites scènes bien flippantes et diaboliquement efficaces. La série interroge également les drames du quotidien (le suicide, la dépression, les maladies mentales, le deuil, la drogue, les abus sexuels, l'alcoolisme, la guerre...) comme le ferait un bon roman de Stephen King, dans lequel on finit toujours par découvrir que le vrai monstre, c'est l'homme. Elle présente de manière à la fois crue et pudique toutes ces sources d'horreur et d'anxiété, les intègre habilement dans la trame narrative, et à la sortie de chaque épisode, vous vous retrouverez vite avec un sentiment de malaise qui n'est pas tant dû aux jumps scares (et l'impression désagréable qu'il y a quelqu'un derrière vous) qu'à la dure réalité de ce monde. La peur... et toutes ses variantes.

Pourtant, je vous parle de peur, je vous parle d'horreur, mais ce n'est pas ça que j'ai retenu de cette série. L'histoire de fantômes, on s'en fout, en fait : elle ne sert que de prétexte à exposer un drame familial. The Haunting of Hill House EST un drame familial. Terrible, émouvant, éprouvant. The Haunting of Hill House c'est l'histoire de ce drame, et comment on essaie d'aller de l'avant après ça. C'est édifiant. Je ne cacherais pas que j'ai versé ma petite larme à plusieurs reprises, et qu'au fur et à mesure des épisodes, je me suis attachée à la galerie de personnages qu'est cette formidable famille. Je voulais les voir s'en sortir. Je voulais les voir dépasser leurs peurs, se sauver, s'aimer, se soutenir, redevenir une vraie famille malgré tout ce qu'ils avaient vécus. Ce que j'ai le plus aimé, finalement, c'est l'histoire de cette famille, derrière ces secrets, ces portes closes, ces mystères, voir les incompréhensions, l'amour et le pardon. C'était beau, jusqu'à cette fin plutôt apaisante qui m'inviterait presque à vous inciter à tout regarder d'une traite, car c'est une série qui se binge-watche aisément.

Un dernier mot pour les acteurs. Magnifiques. Époustouflants. Carla Gugino (Spy Kids, Watchmen, Sucker Punch) d'une remarquable justesse, donne la réplique à un Henry Thomas qui, aux côtés de Henri Hutton, nous offre une figure paternelle touchante. Les 5 enfants de la famille Crain sont parfaits, qu'ils soient interprétés par des adultes (Elizabeth Reaser, Kate Siegel, Michiel Huisman, Olivier Jackson-Cohen et l'épatante Victoria Pedretti) ou par de jeunes acteurs (Paxton Singleton, Lulu Wilson, Mckenna Grace, les adorables Julian Hilliard et Violet McGraw). Il y a quelque chose de très dramatique dans le jeu des adultes, au fur et à mesure qu'on s'avance dans l'histoire, que je trouve totalement adapté à l'histoire. Et chacun aura son moment pour vous séduire, vous émouvoir. Un casting de choix, donc.

BREF

J'ai un peu eu l'impression de découvrir l'enfant caché des excellentes séries This is Us, Six Feet Under, American Horror story saison 1, ou encore de la mini-série Ça, il est revenu. Et je ne vais pas m'en plaindre, avec de telles références, on ne peut que s'attendre à quelque chose de bien. A mes yeux, autant que les séries citées précédemment, The Haunting of Hill House est un must-see absolu. Pour peu que les histoires familiales vous séduisent et que les fantômes ne vous traumatisent pas, vous devriez vraiment la regarder.