Wonder Woman est l'une de mes héroïnes de comics préférée, autant pour ce qu'elle représente que pour les fabuleux arcs narratifs au cœur desquels on la retrouve. Son attitude, sa morale, l'image positive qu'elle renvoie, surtout si on la compare à ses collègues dans d'autres licences... Elle a une place centrale dans la popculture au féminin, notamment parce qu'on la considère à juste titre comme une icône féministe. Pour rappel, Marston, le créateur du personnage, était un féministe convaincu (ce qui, à l'époque, était encore rare). Je tiens beaucoup à Wonder Woman, et j'aimais bien la première adaptation du comics sous forme de série télé, parce que tout ça était bien respecté. La Diana de Lynda Carter était pétillante, brillante, forte et vraiment intéressante. Alors même si j'étais plus que ravie de voir Wonder Woman, ENFIN, arriver sur grand écran, j'avais quand même beaucoup d'appréhension. Pas question qu'on massacre mon héroïne !
J'ai une opinion très mitigée sur ce Wonder Woman, mais je dois bien admettre une chose : je n'ai pas été déçue par l'héroïne. Les gens qui ont fait ce film ont bien fait leurs devoirs, et j'avais vraiment la princesse Diana face à moi sur cet écran. Une énième version, avec une énième origin story, mais une véritable Wonder Woman, avec ses qualités, ses défauts, son symbolisme. Je suis vraiment heureuse de me dire que des petites filles grandiront avec un modèle pareil. Gal Gadot n'a pas seulement donné corps à la super-héroine, tout comme Lynda Carter avant elle, elle lui a donné une âme. Voir l'amazone s'émerveiller de toutes les banalités de notre quotidien, se revolter de ce qui ne nous choque plus, ça a vraiment retourné ma petite tête désabusée, nourrie au cynisme.
Ce qui est dommage, c'est que tant de choses gâchent un personnage aussi bien écrit. A commencer par un scénario un peu léger ! Sans vous spoiler, après une introduction assez longue sur l'île de Themyscira, coupée du monde, Diana suit un soldat de la première guerre mondiale dans notre monde, avec dans l'espoir de pouvoir mettre un terme à la der des ders. Comme ça, sur le papier, c'est plutôt chouette, et ça aurait permis de réaliser un épisode magistral, moral, à la façon de Superman - Peace on Earth, le chef d'oeuvre de Paul Dini et Alex Ross, l'une des oeuvres majeures publiées chez DC, qui raconte l'impuissance d'un super héros face à la bêtise humaine. On aurait pu espérer un film avec un message fort, qui reste sombre comme DC essaye de le faire au ciné depuis des années, mais finalement, le tout s'est perdu dans une tentative de "faire du comics". Du coup, on enchaîne des scènes très sympa, des passages épiques... et des ficelles scénaristiques grosses comme des poutres, qui déséquilibrent vachement le film. La fin est tellement classique et attendue... du coup, même si j'ai trouvé le film très sympa, je pense qu'il aurait fallu qu'il sorte il y a 10 ans pour que je sois moins blasée. Wonder Woman tire un maximum d'influence des autres films de super héros sorti ces deux décennies. On y trouve un peu de Captain America, de Thor, des Gardiens de la Galaxie... c'est pas très original, et on ressent souvent une impression de déjà vu face à la collection de clichés qui compose le scénario. Pas ou peu de surprises, une fin au rabais, j'aurais pu laisser passer si c'était un mauvais film d'action, mais là, c'est décevant parce qu'il y avait un énorme potentiel.
La première moitié du film combine des scènes géniales, les dialogues sont plutôt bien écrits, les acteurs doués et visuellement, ça claque. Même si on sent un peu trop le spectre de Zack Snyder dans la réalisation et que l'utilisation des ralentis n'est pas toujours bienvenue (ralentir l'action parce qu'on ne sait pas la filmer lisiblement n'est qu'une solution de facilité), Patty Jenkins fait le job, avec des scènes graves et plus légères qui s'alternent plutôt harmonieusement. Par contre, le tic de réalisation qui consiste à faire des très gros plans sur les personnages tout le temps, c'est sympa 5 min, mais c'est quand même dommage qu'on ne profite pas plus des décors. Bon par contre, l'effet "je connais le visage de Gal Gadot dans ses moindres détails, aussi bien que son mari" est garanti.
Il y a plein d'autres points qui m'ont fait tiquer, mais ça m'embête d'en parler. Ça m'embête de râler sur l'absurdité de ces costumes d'Amazones aux breastplates so 80's, des talons de Wonder Woman, parce que j'ai l'impression que si les héros avaient été des hommes, personne n'aurait parlé de leur tenue. Surtout qu'à la réflexion, on a evité les tétons apparents du Batman de Clooney, alors c'est peut-être pas si grave. Ça m'embête de m'être fait plusieurs fois durant le film la réflexion que pour des Amazones ultra sportives, elles n'étaient pas bien musclées. Je sais ce qu'on va me répondre : si on veut des femmes à l'écran, dans les premiers rôles, ceux habituellement réservés aux hommes, c'est quand même un comble de leur donner une apparence "masculine". Je l'entends, mais je reste persuadée que ce dont le cinéma a besoin, c'est d'arrêter de coller le rôle de "la fille moche" (mais sympa-ou pas) à toutes les actrices grandes et fortes. C'était une occasion ratée. Ça m'embête de me dire que merde, pour une fois qu'on a une femme en tête d'affiche d'un film de guerre et de super héros, il FAUT qu'elle la partage avec Chris Pine. Alors oui, son personnage est cool, mais des personnages masculins cool, il y en a plein la pop-culture. On aurait pas pu avoir un vrai damoiseau en détresse, pour le fun ?
Il est vraiment difficile de juger objectivement ce film. Premier film de super-héroine de la nouvelle vague des adaptations de comics, en pleine révolution féministe, premier film mettant à l'affiche Wonder Woman, il ne s'agit pas que d'une œuvre cinématographique. Il a le fardeau de montrer à la moitié de l'humanité qu'on ne l'oublie pas. Il a le fardeau de faire oublier le traitement des personnages féminins dans les licences DC (coucou Harley Quinn). Il veut montrer qu'on peut faire aussi bien avec moins de testostérone. Y parvient-il ? Plus ou moins. Je vous donne rendez-vous dans 10 ans pour revoir ce film au prisme de la révolution qu'il pourrait (ou non) provoquer, et répondre à cette question. En attendant, si je dois le juger à chaud, je dirais que c'est un bon divertissement, un film sympathique et je lui ajouterai la mention "peut mieux faire" parce que vraiment, les gens, c'est pas parce qu'on fait un film de super héros qu'on doit nécessairement se dispenser de peaufiner son scénario.
Allez, on se donne rendez-vous pour Wonder Woman 2, avec la même incroyable actrice, un vrai scénario, et on va défoncer la patriarchie ?