Jurassic World, moitié dino, moitié Chris Pratt, 100% n'importe quoi
Vous savez, les fan-boy-girl-s sont terribles quand il s'agit d'un fandom qu'ils aiment vraiment beaucoup. Parce qu'ils auront beau critiquer, dire "c'était mieux avant" et râler contre le monde entier, ils iront quand même voir le dernier opus de la saga. Regardez avec Jurassic Park. Le 2 était moins bien, le 3 était terrible, et le 4 s'annonçait, bah... comme un épisode 4, quoi. Dans le cas de Jurassic World, on savait bien, dès l'annonce du film, dès la publication du premier trailer, que ça ne sentait pas bon du tout. Un réalisateur inconnu, des dinosaures surdimensionnés, un pitch risible ; pas la peine de se le cacher, on était sûr que la licence -et Chris Pratt- étaient à peu près les seules raisons d'aller voir le film.
Bon bah j'y suis allée, du coup. Parce que des dinosaures et Chris Pratt, ça fait un tas de bonnes raisons d'aller poser mes fesses sur un siège de cinéma.
Je ne vous le cacherai pas plus longtemps, Jurassic World était largement à la hauteur de mes attentes. Attentes qui, je vous le rappelle, ne volaient pas bien haut - à peine plus que les ptérosaures du parc, d'ailleurs. Pas de surprise sur le pitch, pas d'éclair de génie, mais toutefois, un film qui, dans toute sa première partie du moins, rempli honnêtement le contrat. C'est vraiment marrant, avec des dialogues pas dégueu, dynamique, et ça fourmille de moments vraiment épiques. Comme ses prédécesseurs, Jurassic World reste dans la lignée du film d'horreur de monstres, mais dans une version toute à fait regardable par des enfants (euh, pas trop jeunes quand même, hein, parce que cette fois, les morts se comptent par dizaines) puisque, si le sang gicle, c'est la plupart du temps hors caméra. Jurassic World fait le job et dépense sans compter pour nous faire vivre une expérience drôle et un peu flippante, un hommage à l'un des films cultes de plusieurs générations.
Bon, en même temps, Chris Pratt qui conduit une meute de raptors à moto, ça aurait pu suffire à faire un bon film. (NDLR : ceci est une opinion qui n'engage que l'auteur, c'est à dire moi. Mais avouez, quoi, cette affiche à de la gueule, la scène aussi)
Ce qui est un peu dommage, c'est que malgré une tension plutôt bien gérée, ce quatrième opus ne parvient pas un seul instant à rétablir le frisson des scènes les plus effrayantes du premier film... Il y a des ébauches, des passages vraiment bien foutus, mais je pense que la raison pour laquelle la peur est moins intense, c'est simplement le fait que les personnages, bien que tous sympathiques, sont trop rapidement expédiés par le scénario. Ils manquent de profondeur, et du coup, pas le temps de vraiment s'attacher à eux. Les acteurs peinent un peu à leur donner de l'intérêt, mais si on prend le film pour ce qu'il est, leur jeu suffit amplement.
Donc je disais, la première partie du film est vraiment pas mal. On conserve l'esprit de la trilogie d'origine, en y faisant de lourdes références permanentes. Quelqu'un qui n'aurait pas vu les trois premiers films n'aura donc probablement pas la même impression de déjà vu que les fans de la première heure. Même les deux jeunes acteurs semblent tout droit sortis d'un film d'aventure dans le genre des Goonies ! De même, les looks des dinosaures sont vraiment vintages. On pourrait presque croire qu'il ne s'agit pas d'un film original mais d'un fan-film, un énorme fan-film fait avec un énorme budget et des stars. Il rend hommage à Spielberg, donc... mais pas uniquement ! Étrangement, on retrouve également beaucoup du Godzilla de Emmerich (qui lui-même faisait référence au Jurassic Park de Spielberg, c'est vraiment le serpent qui se mord la queue), du Alien (dont de nombreuses références à Alien 4, qui a plus d'un point commun avec ce "Jurassic Park 4"), du Predator, et tout un tas d'autres petits clins d'oeil au cinéma de genre. Qui a dit Peur Bleue ?
Ce qui aide à situer ce film dans son contexte, finalement.
Parce que la deuxième partie de Jurassic World... On est dans le film de genre. Les deux pieds bien dedans comme dans de la bouse de tricératops. Impossible d'en sortir. On est dans la démesure, dans le n'importe quoi, dans les comportements absurdes et les scènes invraisemblables. Bizarrement, cette partie aussi m'a séduite, mais pour des raisons complètement différentes : c'est tellement n'importe quoi que j'ai passé presque toute la fin du film à rire comme une baleine (ou dans notre cas, un mosasaure). Même après le générique, j'en pleurais encore. L'absurdité de certaines scènes, le manque de densité des personnages, les dialogues improbables entre les dinosaures, les réactions suicidaires des personnages -méchants comme gentils- et les petits bouts d'histoires secondaires qui tombent là-dedans comme des cheveux sur la soupe...
Jurassic World revendique son héritage, sa filiation aux précédents volets mais aussi à tout un cinéma qui, de Godzilla à Megashark vs Giant Octopus, tire moins du chef d'oeuvre que le tout premier Jurassic Park. Il assume son côté un peu concon et complètement nanardesque. Et c'est ça qui est bon. C'est d'ailleurs limite pour ça qu'on met les pieds dans la salle de ciné.
Dans Le Monde Perdu, Ian Malcolm a cette réplique absolument parfaite pour résumer chacun des films de la saga : "Oh oui. Oh ! Ah ! Ça commence toujours comme ça. Et puis après il y a les "sauve-qui-peut" et les hurlements".
Ici, les Oh! et les Ah! ne sont pas si présents -le film peine à nous émerveiller. Enfin, moins que son plus vieil ancêtre. Probablement que ça sert son propos de "maintenant que le parc est ouvert, les dinosaures, ça blase un peu tout le monde", qui peut être perçu comme une critique de notre tendance à ne plus s'émerveiller de rien -parlez pour les autres, pas pour moi, hein.
Les "sauve-qui-peut" et les hurlements sont là aussi, mais bizarrement, on y croit moins. Blasés, nous sommes ? Peut-être. Pourtant, au départ, on y croirait presque, lorsqu'on rencontre ce nouveau dinosaure hybride, on sent les petits poils se hérisser sur notre échine. On sent qu'il y a moyen de flirter avec la peur panique et le souffle coupé. Mais bon, le réalisateur perd un peu en profondeur chaque fois qu'il fait combattre notre amie la dinosaure -et bien plus encore- ce qu'il gagne à rendre le film beaucoup plus proche de l'action que du thriller. C'est un choix.
Je me permettrais encore un petit mot sur la musique et les effets spéciaux. La musique, tout d'abord, reprend les célèbres thèmes de John Williams tout en y ajoutant la patte de Michael Giacchino, un compositeur ma foi fort talentueux et très productif en ce moment. C'est une BO très réussie, avec un nouveau thème vraiment sublime, qui reste en tête, et qui apporte un cachet indéniable au film. Clapclapclap, j'applaudis des deux mains -en même temps avec une seule main, pas pratique, mais bon si un dinosaure vous la chope, vous avez plus le choix je suppose.
Côté effets spéciaux, c'est moins surprenant que ce à quoi je m'attendais. Toutefois, mon désarrois se porte plus sur la multitude de dinosaures en tous genres et leur affreux rendu très "nineties" que sur la qualité du travail. Les scènes avec les raptors sont à mon goût les plus réussies sur ce point. Et puis il y a des explosions, et ça, c'est toujours cool.
Alors non, c'est sûr que si vous attendiez un chef d'oeuvre, une grande histoire, une morale originale ou un simple minimum syndical de respect de la réalité biologique des dinosaures, bon, vous n'êtes vraiment pas obligés d'aller le voir.
Par contre, si vous avez toujours de la tendresse pour Le Monde Perdu et que vous considérez que Jurassic Park 3 n'est pas une hérésie, vous devriez probablement prendre votre pied. Au pire, vous aurez vu Omar Sy dire plus que 3 phrases dans un film hollywoodien, des gros dinosaures pas réalistes, une nana badass sauver tout le monde en courant avec des hauts talons dans la forêt, Chris Pratt dresser des raptors et surtout, un mega-dinosaure jouer avec une mega-baballe.
En bref, si vous n'avez pas trop d'attentes sur ce film et que vous avez un peu d'humour, je pense que vous allez vous payer une bonne tranche -de steak de dino transgénique- parce que dans son genre, c'est un grand film.
Si vous aviez déjà envie d'aller le voir, vous ne pouvez pas ne pas le voir !*
*Ouais, j'ai fait exceptionnellement un mix dans les notations.