Moment Disney : Portrait de Jasmine

Jasmine, sale gosse et sexy

Film : Aladdin, 1992

Age : 15 ans

Nationalité : Chinoise Perse

Statut : Mariée

CV : princesse Disney officielle, fille de sultan, femme du futur sultan

Chanson : Ce rêve bleu

Jasmine pourrait être une princesse de second plan. Elle n'est qu'un personnage secondaire de son film – si le conte s'appelait Jasmine et la lampe magique, ça se saurait –, elle n'est pas vraiment proactive, et son film échoue au Bechdel test avec mention.

Tout comme Ariel, elle cherche à s'échapper de sa vie de palais, mais son geste n'est pas complètement gratuit, puisqu'elle quitte le palais presque à regret, pour échapper à un mariage forcé. Cette attitude est sans doute assez anachronique : c'est celle d'une jeune femme moderne. Celle aussi d'un archétype très populaire ces dernières décennies, la « princesse rebelle », cette jeune fille noble qui rejette les privilèges – et les devoirs – qu'impliquent sa naissance. De ce point de vue-là, Jasmine n'apporte rien de particulièrement nouveau. Pourtant, elle marque un vrai tournant par rapport à toutes les princesses qui l'ont précédée.

Avec Jasmine, Disney ouvre à nouveau tout un tas de portes pour ses futures princesses, et d'abord celle de la diversité ethnique. Avant elle, toutes les princesses étaient blanches, et plus particulièrement européennes. Bon, les moyen-orientaux, ce n'est pas non plus le groupe ethnique le plus éloigné des européens, mais bon, c'est un début. Jasmine ouvre donc le chemin à Pocahontas, Mulan et Tiana.

On peut se poser d'ailleurs des questions sur le choix de l'ethnie de Jasmine. Dans le conte original des Mille et une nuits, l'histoire d'Aladdin se passe en Chine, et la princesse s'appelle Badroulboudour.

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Ok, je reviens sur ce que j'ai dit, je comprends pourquoi ils ont laissé tombé l'idée de la Chine.

L'autre nouveauté qu'apporte Jasmine, c'est que c'est la première princesse Disney avec un caractère de merde. Eh oui. Certaines autres princesse s'agaçaient ou se mettaient en colère, mais en général ça restait soft et mignon. Même Belle, quand elle se dispute avec la Bête, reste mesurée : elle hausse certes un peu le ton, mais sa colère est assez contenue – sans compter qu'elle est justifiée. Avec Jasmine, on passe à un autre niveau.

Déjà, elle râle une scène sur deux. Ensuite, elle a une façon un peu spéciale d'exprimer son mécontentement : vous vous souvenez du prince Ahmed qui vient lui faire sa cour au début du film ? Quand il l'énerve, elle lance son tigre sur lui. SON. TIGRE. DOMESTIQUE. Les petits oiseaux, lapins mignons, chevaux fidèles, c'est pour les fillettes. On reste chez Disney, donc le prince Ahmed ne finit pas déchiqueté sur le sol de marbre blanc du palais, et se contente de partir les fesses à l'air. Mais quand même. On s'est donc drôlement éloigné de la femme parfaite que représentait Blanche-Neige ; dans les années 1990, les princesses ont gagné le droit d'avoir une personnalité, même si ça veut dire ne plus représenter la perfection féminine.

- Les "canapés" ? Connais pas...
Amy Mebberson

Jasmine n'est pas une héroïne particulièrement entreprenante, mais elle ne se défend pas si mal – d'autant qu'Aladdin n'est pas vraiment une lumière non plus. Sa tentative d'évasion foire certes lamentablement, mais quand un brave jeune homme vient à sa rescousse, elle est suffisamment maline pour rentrer dans son jeu tout de suite et sauver ses miches – enfin sa main surtout. Elle réussit également à détourner l'attention de Jafar au moment crucial, sur un simple signe d'Aladdin.

Du point de vue physique, Jasmine marque également un pas en avant dans la sensualité. Elle est certes très légèrement plus couverte qu'Ariel, cependant elle est beaucoup plus consciente de son corps et de ses charmes. C'est la première princesse à utiliser sa sexualité comme arme pour distraire l'antagoniste du film, et à même échanger un baiser avec lui. L'oie blanche, très peu pour elle !

Jasmine profite également du développement d'Aladdin dans deux suites tout à fait regardables, Le Retour de Jafar et Le Roi des voleurs, ainsi qu'une série, pour continuer à prendre de l'importance : elle n'est pas juste son intérêt amoureux, mais aussi son accolyte dans l'aventure.

Tout en restant en retrait par apport au vrai héros du film, Jasmine réussit à avoir une vraie présence dans le film, tout en introduisant une vraie nouveauté chez Disney. Cette princesse n'est pas un modèle, mais elle est certainement plus proche de nous que nombre de ses camarades.

Profitons que nous parlons de Jasmine pour soulever ce problème qu'est le nouveau design des princesses Disney. Avec le développement de la franchise au début des années 2010, les anciennes princesses ont été en grande partie redessinée pour les goodies. Beaucoup de gens – dont moi – regrettent ces nouveaux designs ; extrêmement cul-culs, tellement couverts de paillettes qu'ils feraient vomir une licorne, je les juge assez problématiques en raison de l'uniformisation des personnages. Les détails les plus originaux des princesses y sont gommés, notamment les peaux quand elles ne sont pas blanches, ainsi que les nez. Je trouve cela très dommage, surtout pour Jasmine et Pocahontas, dont les nez assez caractéristiques d'un point de vue ethnique font tout le charme.

Rappelons également que cette pratique s'appelle le white-washing, et que, ben... c'est raciste.

Est-ce que c'était la peine d'essayer de créer un panel de personnages féminins diversifiés au mental comme au physique pour finir par les retransformer en petites choses fades et inoffensives dans l'espoir de vendre plus de sac à dos ?

Princesse précédente

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