Durarara!

Alors que la nuit tombe sur le quartier d'Ikebukuro à Tokyo, vous appercevez soudain un étrange objet voler devant vous... Un distributeur de boissons vient bel et bien de s'écraser dans une rue adjacente, suivant de près une bande de loubards à l'air effrayé. La source de ce projectile inhabituel s'avère être un grand blond en tenue de barman à l'air quelque peu courrouçé; à peine vous êtes vous remis de votre étonnement, qu'un colosse noir l'air baba cool vous refile un prospectus vantant les mérites d'un étrange restaurant de sushi. Considérant qu'il vaudrait mieux s'éloigner de l'adroit lançeur de distributeurs, vous déclinez alors les sollicitations du marchand pour vous engager dans une autre avenue.
Là, seuls trois lycéens à l'air parfaitement normal se démarquent quelque peu de la foule anonyme, principalement à cause de l'énergumène du milieu, vantant on ne sait trop quoi à ses deux camarades plus réservés, un garçon d'aspect banal en train de pianoter sur un téléphone portable, et une jeune fille plutôt attrayante au nez chaussé de fines lunettes rondes. Mais alors que vous pensiez enfin avoir regagné un semblant de normalité, tous les regards se tournent vers un motard vêtu de noir se déplaçant à une vitesse hallucinante sur la chaussée, dans une absence de bruit plus que suspecte. Décidément, vous êtes en droit de vous demander dans quel endroit vous avez pu tomber, et cette paire d'yeux rougeâtres vaguement apperçus se faufilant dans les ombres d'une impasse n'est pas pour vous rassurer. Et le sourire de l'individu au col de fourrure que vous venez de croiser est au fond tout aussi suspect, on dirait bien qu'il a assisté à toute votre aventure et qu'il trouve matière à en rire à vos dépens... Heureusement, une visite guidée dans l'univers de Durarara vous attend désormais, afin que vous puissiez appréhender sans crainte l'oeuvre de Ryohgo Narita et Brain's Base studio.
Deux noms dont la combinaison doit rappeler d'excellents souvenirs à de nombreux otakus, qui les associent immédiatement avec un certain chef d'oeuvre nommé Baccano. Adapté par le second d'après une série de romans du premier, Baccano avait en 2007 acquis une solide réputation d'excellence, malgré le fait qu'il n'ait pas atteint les audiences mirobolantes des autres séries cultes diffusées cette année là, telles Code Geass, Claymore, et surtout Gurren Lagann. Et en 2010, fut diffusé une nouvelle série, produite par cette même équipe gagnante, à partir d'une série de romans du même auteur: Durarara! Autant vous dire que les milieux otakus étaient en effervescence à cette annonce, et la popularité de la nouvelle série grandit plus rapidement qu'il n'en faut à une rumeur pour faire le tour d'Ikebukuro. Car Durarara!, c'est la patte caractéristique de Baccano, associée à un setting semi-fantastique se déroulant dans un Japon moderne dans lequel évoluent des personnages qui échappent le plus souvent aussi habilement aux clichés qu'à leurs ennuis...

La série de romans initiale fut démarrée le 10 avril 2004 et compte actuellement 8 tomes, elle est cependant toujours en cours. La voie habituelle du succès s'est alors déroulé devant Durarara, avec une première adaptation en manga publiée à partir d'avril 2009, et bien évidemment, la populaire série animée en 24 épisodes ayant été diffusée de janvier à juin 2010. Les droits pour la série ont été immédiatement acquis par l'éditeur Beez pour l'Europe; en france c'est Dybex qui s'est chargé de la diffusion, quasi simultanée avec le Japon, et gratuite via Dailymotion.  Un premier véritable coup d'audace de Dybex en matière de diffusion streaming légale et gratuite, le succès de Durarara étant à l'origine bien moins garanti que celui de FMA Brotherhood, série avec laquelle l'éditeur entama son heureuse initiative. Laquelle mérite un grand respect, et est un gage d'une évolution certaine des mentalités des éditeurs; le progrès ne se  fera pas en un jour, et la généralisation du procédé est encore loin. Cependant, offrir la possibilité aux spectateurs de découvrir la série, en VOSTFR, sans débourser un sou, ne peut que faire du bien à l'image de Dybex.

Durarara! est une fantasy urbaine se déroulant, comme je l'ai déjà mentionné, dans le quartier d'Ikebukuro à Tokyo. Mikado Ryugamine est un jeune lycéen venu d'un village de campagne paumé pour étudier à Tokyo, poussé à cela par son extravagant meilleur ami, Kida Masaomi. Ce dernier lui fait rapidement découvrir l'ensemble du quartier cosmopolite, tout en mentionnant les nombreux mystères et personnages le peuplant, certains n'étant pas forcément recommandables. Et si les factions d'une guerre des gangs passée se sont maintenant calmées, la population ne peut qu'être intriguée par ce fameux motard noir, qui n'aurait pas de tête et traverse sans bruit les avenues... Tandis que l'irascible Shizuo Heiwajima déchaîne sa force surhumaine sur tous ceux qui ont le malheur de le faire sortir de ses gonds, en particulier le cynique "informateur" et conspirateur répondant au nom d'Izaya Orihara... Ces deux là feraient mieux d'essayer le restaurant de "sushi russes" tenu par le pacifique Simon Brezhnev.  Nombreux sont ceux qui mentionnent l'apparition d'un nouveau gang appelé "Dollars", bien que personne ne puisse  dire exactement quels sont ses intentions, qui sont ses membres, ou même quel est son but. Sans compter les multiples intrigues agitant en permanence la cité, les kidnappings, les suicides, la reformation des anciens gangs, ou le tueur aux yeux rouges, que l'on appele "Slasher"... De quoi animer bien des conversations sur un chat online, dont les membres sont enclins à spéculer sur les événements multiples se déroulant dans la cité... Mais au fait, ces membres... qui sont-ils?
Une des innombrables questions que l'on est en droit de se poser devant l'organisation d'Ikebukuro. Car à l'instar de Baccano, on se retrouve devant un setting complexe faisant intervenir un nombre conséquent de personnages. Mais là où Baccano alternait sans vergogne les époques, en éclairant subrepticement le schéma global par le biais de ses quatre histoires entrelacées, Durarara préfère une narration chronologique, plus proche des romans; cependant le personnage suivi change à chaque épisode.

Ainsi, les histoires entremêlées de tous ces personnages, surprenants à plus d'un titre, permettront au spectateur de reconstituer lentement le schéma global des intrigues multiples agitant Ikebukuro. Lesdits personnages en profitent pour nous révéler leurs histoires personnelles, qui révèleront qu'ils sont bien davantage que les clichés et autres idées reçues que leur première apparition évoque inévitablement. Car oui, même si le scénario se déroule dans un Japon moderne et est donc plus enclin à l'utilisation des poncifs de l'animation que Baccano, l'histoire est tout aussi bien orchestrée et certaines révélations innatendues sont au programme. Par exemple, les trois lycéens, Mikado, Kida et leur camarade (gâtée par la nature il faut le dire) Anri, ne sont sûrement pas ceux qui semblent réserver au spectateur les moments les plus passionnants dans une histoire fréquentée par un motard sans tête ou un individu capable de soulever des panneaux de signalisation pour s'en servir d'arme... Et pourtant, tous trois jouent un rôle clé sur l'échiquier d'Ikebukuro, et sont infiniment plus que les écoliers de base qu'ils paraissent... Difficile d'en dire plus sans vous spoiler toute l'histoire, mais une présentation sommaire de l'essentiel du casting devrait vous éclairer sur les multiples points de vue adoptés au cours de la série.

Celty Sturluson: La mystérieuse motarde sans tête, qui s'imposera rapidement comme l'un des personnage principaux. Celty est une authentique Dullahan, un esprit du folklore celtique qui passait son existence à chevaucher dans les montagnes et forêts d'Irlande, rendant visite à ceux dont la mort approchait, leur versant des seaux de sang à la face... Jusqu'à ce que quelqu'un ne lui vole sa tête, et par là même tous ses souvenirs. Ne pensant plus qu'à récupérer son anatomie manquante, elle pourchasse le voleur jusqu'à Ikebukuro. Histoire de se faire moins remarquer dans une ville du XXIème siècle, elle incarne son cheval sans tête dans une moto, et porte un casque (avec oreilles de chat intégrées) lorsqu'elle sort en ville. Elle exerce le métier de coursier, portant d'un bout à l'autre de la ville des messages pour l'une ou l'autre des personnalités louches du quartier, mais elle est prête à rendre la justice si le besoin s'en fait sentir. Comme elle n'a pas de tête, elle ne parle pas et communique donc en écrivant sur son téléphone portable. Elle est capable d'utiliser la fumée noire qui s'échappe de son corps pour modéliser son arme, une faux, immobiliser un adversaire, ou même pour transporter des objets.

Mikado Ryugamine: Nouveau venu à Ikebukuro, Mikado est un jeune garçon plutôt timide qui n'avait jamais auparavant connu autre chose que son village de campagne. Il manifeste par conséquent une grande curiosité envers l'environnement d'Ikebukuro, s'interrogeant notamment sur l'identité du motard sans tête ou encore sur les activités des Dollars... Ah, n'oublions pas l'essentiel: c'est l'un des nôtres, ses tendances geek transparaissent parfois au cours de la série. Forme avec son ami Kida et Anri Sonohara le trio de lycéens normaux-mais-non-en-fait. Ajoutons que son faible pour Anri est plus qu'évident, notament lorsqu'il trouve que Kida la drague d'un peu trop près.

Masaomi Kida: Meilleur ami de Mikado, il vit depuis des années à Ikebukuro, et connaît donc bien le quartier et ses étranges habitants; il se fait donc un plaisir de le faire découvrir à Mikado. Extraverti et visiblement insouciant, il s'est fait une spécialité des blagues pourries et drague sans vergogne ni succès tout ce qui passe à sa portée. Il semblerait que sa véritable petite amie soit à l'hôpital, mais il se montre peu bavard sur le sujet.

Anri Sonohara: Camarade de classe de Kida et Mikado et troisième membre du trio de lycéens. Une jeune fille très introvertie qui semble peu encline à se laisser impliquer dans des relations amicales et encore moins amoureuses. Vu son physique, ce dernier point n'est pas le plus apprécié des hommes qui la croisent, de Mikado jusqu'à l'usuel professeur pervers. Elle s'inquiète également pour sa meilleure amie, Mika Haruna, qui a disparu depuis quelque temps. Son comportement renfermé frise le dérangeant par moments, et on se dit peu à peu qu'il y a sans doute une raison derrière la façade qu'elle montre au monde...

Izaya Orihara: Le plus célèbre informateur de tout Ikebukuro. Basiquement, il connaît les secrets de la plupart des gens du quartier, et se sert de leur révélation pour manipuler joyeusement tous ceux qui ont le malheur d'écouter ses discours. Puis il les manipule encore, et éventuellement en rajoute une couche. Prêt à pousser des jeunes filles au suicide , ou à faire s'entredéchirer plusieurs clans parceque ça l'amuse, il clame haut et fort adorer toute l'Humanité (sauf Shizuo Heiwajima). Autant vous dire que sa, hum, "philantropie", ne l'empêche pas d'être le principal antagoniste, le plus souvent. Difficile de dire quels sont ses buts, en tout cas il n'est jamais à cours de conspirations, qu'il modélise sur un étrange plateau de jeu mélangeant la majhong, le go, les échecs et les cartes. Ajoutons qu'il est très habile au couteau, dans le cas où il devrait lui même se défendre (comprendre que ses ennemis ne sont pas assez intelligents pour qu'il les pousse à s'entretuer). Il est bon de noter que son nom dérive de l'hébreu (japonisé) Isaiah, "celui qui observe la foule"... Tiens, tiens. Un des personnages les plus populaires de la série, malgré son côté conspirateur qui en fait le troll incarné même IRL.

Shizuo Heiwajima: L'homme le plus fort d'Ikebukuro, le très redouté grand blond en costume de barman. Celui là même qui balance tout objet lourd lui tombant sous la main dès qu'on l'énerve un peu. Car bien qu'il dise détester la violence, son tempérament impulsif et extrêmement colérique, associés à sa force proprement surhumaine le poussent à massacrer tous ceux qui osent le provoquer, le regarder de travers, mal s'habiller, lui parler de son frère, ou lui rentrer dedans par hasard. Et surtout, il déteste cordialement Izaya depuis qu'il l'a rencontré lorsqu'ils étaient encore au lycée. Surtout que ce dernier passait son temps à le provoquer, voire à le faire accuser de crimes. La raison de sa force comme de son tempérament colérique nous est présentée comme étant l'absence chez lui des "limiteurs" cérébraux qui empêchent tout humain normal de soulever des objets dont le poids lui briserait les os et lui déchirerait les muscles. Il utilise donc 100% de sa force physique... mais n'est pas doté de l'invincibilité qui va avec, et déchaîner sa force lui est en général plutôt douloureux. Mais quelques années d'expérience l'ont rendu extrêmement endurant, aussi n'espérez pas le ralentir avec une simple blessure... Rien d'étonnant au fait que son surnom parmi les fans anglophones soit GARtender... Notez qu'il est plutôt amical lorsqu'il est calme.

Simon Brezhnev: Un grand noir de nationalité Russe, émigré au Japon où il tient avec un ami un restaurant de sushi. Il passe le plus clair de son temps à vanter les mérites dudit restaurant auprès des passants, dans un japonais quelque peu approximatif (bien que le seiyuu utilise un accent anglais, et non russe...). Un grand pacifiste, toujours calme, préconisant la dégustation de sushi pour apaiser les conflits... et le seul capable d'arrêter Shizuo à mains nues.

Shinra Kishitani: Le médecin clandestin de référence à Ikebukuro, malgré son jeune âge. Ses compétences sont sans doute liées à l'instruction de son père, lui même un grand chirurgien, quoiqu'un peu fou. Il vit avec Celty, ne cache pas qu'il aimerait sortir avec elle, et est un brin pervers. Il était au lycée avec Shizuo et Izaya, et les connaît donc bien tous les deux. Il est indubitablement un peu bizarre à ses heures, mais pas trop dangereux dans le fond, surtout qu'il fréquente à la fois Shizuo et Celty, lesquels savent le calmer rapidement...

Kyohei 'Dotachin' Kadota: Leader du groupe au van, quatre personnages (lui même, Erika, Walker et Togusa) qui patrouillent la cité à la recherche de rumeurs intéressantes, ou s'occupent de livrer diverses informations. Plutôt calme et posé lorsqu'on utilise pas son surnom, "cadeau" d'Izaya Orihara.

Erika Karisawa & Walker Yumasaki: Duo d'otakus hardcore, ces deux lurons passent leur temps à discuter de mangas, d'animes et de light novels (aka séries de romans "jeunesse" le plus souvent illustrés par un mangaka) , voire à tenter de les appliquer à la réalité, ce qui n'est pas toujours plaisant pour leurs "victimes"... Peu soucieux du monde réel s'ils ne peuvent pas y trouver une analogie dans la culture populaire japonaise, ils servent de vecteur à de nombreuses références, parfois un peu obscures pour le spectateur occidental, au cours de la série. Sont aussi un bon moyen pour brain's base de se faire de la publicité, mais aussi de réaliser des clins d'oeil aux réactions des fans vis à vis de la série: par exemple lorsqu'Erika mentionne que Shizuo et Izaya feraient un magnifique couple Yaoi, reflet assez fidèle des forums de discussion sur la série à l'époque.

Saburo Togusa: Le conducteur du van et dernier membre du groupe de Kyohei. Plutôt facile à vivre tant que l'on n'abîme pas son van, ou qu'on ne l'empêche pas d'assister aux concerts de la pop idol qu'il vénère, Ruri Hijiribe.

Namie Nagiri: Chef du 6ème laboratoire de l'entreprise pharmaceutique Yagiri, qui si l'on en croit la rumeur se livre à quelques expériences louches. C'est également la soeur très, hum, possessive, de Seiji, qu'elle semble aider dans sa fuite. Il est vite clair que ses sentiments pour lui lorgnent clairement du côté de l'inceste, et elle ferait tout pour le garder à sa portée. Dans la seconde moitié de la série, elle est employée par Izaya Orihara.

Seiji Yagiri: Ce lycéen, dans la même classe que Mikado, a quitté l'école le premier jour pour s'enfuir en compagnie de sa petite amie, laquelle est très mystèrieuse, sans doute liée à plusieurs des intrigues de la cité. Comme indiqué précédemment sa soeur le soutient dans sa fuite; on notera que ce n'est sûrement pas le personnage le plus sain d'esprit de la série.

On se retrouve donc à suivre tous ces personnages au coeur des intrigues d'Ikebukuro, chaque épisode nous en révélant un peu plus sur eux et éclairant par là le puzzle global. D'autres personnages secondaires tout aussi barrés, tels le père de Shinra ou le policier motocycliste poursuivant Celty dans certains épisodes viendront se joindre au cast déjà impressionnant, quoiqu'ils ne soient pas aussi développés. Un développement qui, là encore, rappelle fortement Baccano: des personnages disposant tous d'un grain de folie (bon, dans certains cas, un silo entier, voire les 10 hectares de champs, l'exploitation agricole, et le parc de tracteurs qui va avec) s'entrecroisent au milieu de multiples intrigues et sous-intrigues, leurs histoires personnelles fortement imbriquées dans le grand tout.
Et le parallèle avec Baccano se fait sentir à bien d'autres niveaux: les deux openings suivent le même schéma, présentant et nommant un à un les personnages à l'écran, passant de l'un à l'autre par de subtiles transitions; et des images du grand succès de Brain's Base apparaissent parfois au cours de la série, sur les écrans publicitaires ou les affiches. Cependant, outre son univers plus moderne que son illustre ancêtre, Durarara se démarque par une technique de narration différente, plus classique, comme décrite plus haut. Les 24 épisodes de la série peuvent être divisés en trois arcs principaux, le premier relatant essentiellement la quête de Celty à la recherche de sa tête, le second centré sur l'enigmatique "Slasher", et le dernier mettant en place la "guerre des gangs" orchestrée par Izaya Orihara. Par contre, n'espérez pas que la série vous offre toute l'intrigue sur un plateau, la multiplicité des points de vue étant ici utilisée autant dans le but de développer les personnages que de brouiller les pistes, jusqu'à ce que les révélations prennent le dessus en fin d'arc. Révélations qui sont clairement la force de la série, et on est aisément surpris, tant d'avoir été berné par les scénaristes que par les attitudes des personnages. L'humour est omniprésent et rafraîchit allègrement, via certaines séquences jubilatoires, une ambiance parfois clairement sombre; n'oublions pas que des gangs, des laboratoires peu scrupuleux ainsi qu'un tueur psychopathe rôdent dans Ikebukuro. Des scènes telles qu'Izaya tournant sur sa chaise de bureau en clamant son amour de l'Humanité ou les délires de Walker et Erika sont autant de petites perles que recèle la série, et que certains fans évoquent avec un sourire quasi extatique.

Cependant, c'est aussi du côte de ses intrigues et de la gestion de son temps que Durarara souffre le plus de sa comparaison avec Baccano. Car lorsqu'on a pour ancêtre un modèle de narration ultra nerveuse, ne laissant aucun temps mort tout en se concluant magistralement, et que l'on s'inspire dudit ancêtre à tous les niveaux, il faut s'attendre à un retour de bâton à la moindre faiblesse. Que Durarara ait adopté un rythme plus lent n'est pas gênant en soi, les personnages faisant littéralement l'intrigue, et 24 épisodes semblent bien suffisants pour tout développer convenablement.

Mais une baisse de qualité se fait néanmoins ressentir lors de la seconde moitié de la série: bien que suivant toujours les romans, certaines sous-intrigues se voient introduites puis inexplicablement mises de côté, alors que les épisodes sont forcés de se concentrer majoritairement sur l'enjeu principal de l'arc. Par exemple, le motard de la police poursuivant Celty apparaîtra dans un épisode, et ne reviendra qu'à la toute fin pour botter les fesses à l'un des antagonistes du dernier arc. Une baisse qui tient peut être aussi de l'importance accordée aux trois lycéens, qui même en prenant en compte leurs secrets respectifs ont fort à faire pour égaler en charisme Celty ou Shizuo. Dommage...

Une seconde partie qui ne doit pas vous rebuter pour autant, ce n'est pas parce que la tension du premier arc n'est pas égalée que la fin de la série est sans valeur, elle vous réservera d'excellents moments, citons au hasard le passage où Kida passe à l'attaque, le combat mémorable de Shizuo, ou la seconde démonstration (bien qu'elle ait tardé) de la puissance des Dollars. Reste que la fin laisse quelque peu le spectateur sur sa faim, et l'épisode bonus (25) inclus avec le dernier DVD, voire une seconde saison semblent plutôt souhaitables.

N'oublions pas que Durarara est également une série riche en références, et pas seulement à Baccano! Comme je l'évoquais, Walker et Erika sont tout indiqués pour évoquer des animes/mangas/light novel populaires, tels Spice and Wolf, Ladies Versus Butlers ou Shakugan no Shana. Le placement produit est aussi présent dans la série, et l'on peut voir apparaître un ordinateur "Mindows 7", une boisson énergisante appelée Red Snake, et divers modèles de smartphones, celui d'apple étant le plus remarquable... Notez que la présence de tels produits situe l'anime près de 8 ans après les dates indiquées dans les light novels, lesdits produits ne pouvant pas être disponibles à l'époque initiale, à savoir en 2002! L'anime est considéré par tous comme se déroulant en 2010. La dynamique des références fonctionne également dans l'autre sens:  popularisée par sa diffusion simulcast dans de nombreux pays, Durarara a rapidement acquis un potentiel mémétique considérable; l'exemple le plus frappant reste la réadaptation du premier ending en faisant apparaître des personnages d'autres séries.

Comme à l'accoutumée, un mot des aspects techniques de la série. Le chara design est quelque peu original, et assez proche de celui des light novels, ce qui contribue à donner une touche unique à Durarara. On remarquera que la foule annonyme, bien que fort présente dans les rues d'Ikebukuro, est toujours représentée en grisé tandis que les personnages principaux sont normalement colorés. Ce jeu de couleurs différenciant les personnages important des membres du tableau de fond sera utilisé de façon fort ingénieuse, à la fin du premier arc... Un phénomène surprenant qui peut dérouter au premier abord, mais ce choix artistique n'a pas été réalisé que dans un but d'économie... Pour ce qui est de l'aspect graphique en général, les décors de la cité sont très bien réalisés, et souvent assez détaillés (ce qui permet de caser une référence discrète sur une affiche au troisième plan, qui plus est).  Et l'animation est bien sûr irréprochable, tout aussi fluide que l'était celle de Baccano. Quand aux musiques, on est loin de l'ambiance Jazzy de Baccano, avec des thèmes plus modernes oscillant entre des ambiances de cité calme, du rock, et des tonalités stressantes lorsque des évènements se produisent dans l'ombre... Et le premier opening et l'ending ont le don de rester dans l'oreille.

Finalement, Durarara, l'une des séries les plus prometteuses de 2010, s'est avérée un excellent cru, ravissant les fans d'anime les plus blasés. Bien que le tableau ne soit pas parfait à cause de la baisse de rythme dans la seconde moitié, Durarara a su se montrer à la hauteur de son prédecesseur Baccano, bien qu'étant encore dépassée par le chef-d'oeuvre de 2007. Aucune raison cependant de ne pas profiter d'une série qui réserve d'excellents moments, aux côtes de  personnages complètement barrés évoluant dans une réjouissante ambiance d'urban fantasy. Pionnière en matière de diffusion streaming légale et gratuite, Durarara n'attend plus que vous ne vous invitiez au coeur des ruelles et des intrigues du quartier d'Ikebukuro!

*'bizarman' a quitté la conversation.*

Comments

[Eith]

Yop ! Lu et relu (XD) toujours aussi alléchantes tes présentations d'anime. Miam !