L'esprit guerrier. La rage de vaincre qui fait du combat un art et vous arrache un sourire réjoui dès que vous croisez le fer avec un adversaire valeureux. Le sentiment de toute puissance qui court le long de votre arme, prêt à se déchaîner dès qu'il faudra déchirer l'ennemi. Que ce soit pour survivre, pour la gloire ou le salut, pour protéger ou étendre son royaume... l'ivresse du combat emporte tout, mêlant les destinées dans une sanglante tornade d'acier... Voilà l'essence même de Sengoku Basara. Cette série de jeux vidéo, dont seul le premier opus est sorti chez nous, en 2006, sous le nom de Devil Kings, a donné lieu au printemps dernier à une série animée, qui a surpris en bien la majorité de son public en s'avérant aussi barrée que jouissive. Aiguisez donc votre lame, et suivez-moi sur les champs de bataille, nous avons un pays à conquérir!
A l'origine... l'Histoire:
Sengoku Basara (le jeu comme l'anime) met en scène des personnages clairement inspirés de grands samouraïs et seigneurs de la guerre ayant peuplé le véritable Japon médiéval, durant l'ère Sengoku. Pour résumer, il s'agit d'une période d'extrême division nationale et de conflits quasi-permanents entre seigneurs féodaux (les daimyos), qui s'étend du XVème au XVIIème siècle. Le pouvoir du shogun ayant quasiment disparu, les seigneurs locaux disposent d'une grande influence et tentent par tous les moyens d'accroître leurs terres, par la guerre, mais aussi par alliances... ou trahisons. Les intrigues et complots de l'époque mériteraient sans doute un prix pour leur nombre et leur complexité. Comme pour toute période trouble, l'ère sengoku a vu l'émergence de nombreuses personnalités marquantes de l'Histoire du Japon, qui ont, en toute logique, inspiré de nombreuses fictions bien après leur mort... Citons Nobunaga Oda, Date Masamune, Sanada Yukimura ou encore Takeda Shingen, qui ont tous leur rôle à jouer dans Sengoku Basara.
Bien sûr, le jeu étant plus que bourrin (logique pour un beat'em all, me direz-vous), et affichant un style manga très prononcé, il ne faut surtout pas s'attendre à une adaptation historiquement fidèle... Au mieux, vous pourrez toujours vous renseigner sur les personnages historiques "repris" dans la série, et constater que si certains détails ont été parfaitement respectés, comme la forme particulière des casques de Date Masamune et Takeda Shingen, qui est l'allié de qui ,ou encore les noms des provinces, l'essentiel est entièrement fictif. Je dirais même plus, totalement exagéré et décalé, avec force anachronismes et déchaînements de super-pouvoirs... Et ça n'en est que plus jouissif, une fois que l'on a compris que l'esprit même de la série, c'est cette suite d'exagérations et d'affrontement sur-dynamiques, orchestrés par des dessinateurs/graphistes travaillant sous perfusion de LSD dans une atmosphère saturée en vapeurs d'opium. L'anime suit bien évidement le jeu dans ce sens.
Ainsi, non seulement Masamune se bat avec six katanas à la fois (trois dans chaque main), mais en plus, son cheval est customisé avec un guidon et un pot d'échappement de moto. Sans oublier le fait qu'il harangue ses troupes en rajoutant de petites phrases dans un anglais parfait (langue totalement inconnue au Japon à l'époque)... A cela on peut rajouter la magnifique EXPLOSION NUCLEAIRE que provoque le premier duel de l'anime, à l'arme blanche pourtant... La liste des anachronismes présents serait longue, entre le guerrier-mécha (livré avec fusées!) et la fanatique des armes à feu (qui non contente d'utiliser des pistolets d'époque à un coup comme si c'étaient des colts, arrive à sortir une Gatling géante et un lance-torpilles de son kimono! Vous l'aurez compris, l'univers de Sengoku Basara ne peut être pris qu'au 3ème degré (au moins).
Jouer peut nuire à la santé... de vos ennemis!
Un petit mot, maintenant, des jeux en eux mêmes. Edités par Capcom, seul le premier épisode à été localisé chez nous, dans une version qui souffrait, comme toujours, du passage sur le sol américain... En effet, outre l'imposition des doublages US à la qualité inconstante, tous les noms du jeu ont été "occidentalisés" de façon hasardeuse et pas toujours très pertinente. Ce qui supprime entièrement les références historiques présentes, et diminue quelque peu l'intérêt du jeu; ceci dit, il est vrai que de telles références sont assez obscures aux yeux des occidentaux, l'essentiel du jeu résidant dans son ambiance passionnée. On pourrait dire que seul le plaisir de mettre une furieuse raclée aux ennemis compte vraiment...
Comme je vous le disais, il s'agit de beat'em all, relativement classiques dans leur conception et leurs mécanismes de gameplay: ils se démarquent peu à ce niveau de la référence du genre, à savoir la série des Dynasty Warriors. Comme dans cette dernière, donc, le joueur incarnera un puissant guerrier devant se frayer un chemin au milieu de centaines d'adversaires pas toujours très malins, à grands coups d'armes blanches et de coups spéciaux dévastateurs, en essayant d'enchaîner le plus grand nombre de coups consécutifs. Ces enchaînements vous permettront, une fois un certain palier franchi, de passer en mode furie, ce qui augmentera naturellement votre puissance et le nombre de coups disponibles. De plus, le moral des troupes ennemies aura une incidence sur leur combativité, ce qui vous oblige à repérer les chefs de bataillon pour les éliminer au plus vite, afin de désorganiser la formation ennemie (souvent pas toujours au top à la base, dans ce type de jeu.) Seul véritable ajout par rapport aux gameplay de la concurrence, Sengoku Basara, passé un certain nombre de coups consécutifs, marque d'un curseur jaune les ennemis dont la mort vous rapportera les plus gros bonus - notamment une augmentation de votre jauge de furie.
Au fil des combats, votre perso obtiendra l'inévitable expérience nécessaire à la montée de ses niveaux, et de ses compétences. Sengoku Basara propose tout de même une bonne vingtaine de combattants jouables, ce nombre augmentant au fur et à mesure des épisodes.
Tout le sel de ce genre de jeu, c'est évidement le plaisir jouissif que donne la possibilité de balayer 50 hommes d'un revers de la main; méfiez-vous cependant des généraux ennemis, tout aussi redoutables que vous... Le charisme très mangaesque des personnages jouables ajoute à l'ambiance complétement barrée de l'univers, et ce n'est pas plus mal, on sent ainsi la différence fondamentale avec d'autres titres se prenant plus au sérieux. Vous comprendrez vite que l'esprit déjanté et ultradynamique propre à la série augmente considérablement le côté épique des joutes sans fin que vous devrez mener. Le jeu se place ainsi comme un pur défouloir, allant encore plus loin dans cette voie que d'autres jeux du même style, le tout rehaussé par de jolies cinématiques en 3D et en animation, qui ne lésinent pas non plus sur les délires visuels. Les sengoku basara sont globalement très jolis in-game, proposant des environnements plus colorés que la moyenne; ceci dit le tableau n'est pas toujours parfait: les environnements sont relativement étroits, et assez vides.
L'histoire des jeux? Oh, il s'agit simplement de conquérir le Japon avec votre général, chacun ayant une campagne différente, certains choix pouvant influer sur la nature de votre prochain adversaire, quelques références historiques se glissant ici et là. Simplissime, en effet, mais très efficace lorsqu'on a besoin d'une bonne séance de bourrinage pour se défouler.
Ceci dit, les Sengoku Basara ont beau remplir leur objectif à merveille, ils ne sont pas exempts de défauts, bien que la série aille en s'améliorant. Déjà, comme n'importe quel beat'em all, la lassitude pointe assez vite, d'autant qu'il y a peu de modes de jeu différents. De plus, il faut reconnaître que vos alliés ne sont pas d'une grande aide, l'IA n'étant pas très puissante. Ceci dit, vous êtes largement assez fort pour éliminer tout ce qui se dresse devant vous, alors pourquoi donc compter sur de frêles soldats? Malgré les lacunes du jeu, on passe un excellent moment en s'y essayant, pour peu que l'on soit fan d'action pure.
Pour finir, signalons qu'outre les suites directes du premier jeu, les Japonais ont pu profiter d'un jeu de baston tout aussi déjanté, Sengoku Basara X. Le troisième opus de la série régulière a été annoncé sur PS3 et Wii; il nous promet de bien belles batailles dans ce qu'il convient maintenant d'appeler, l'ambiance Sengoku Basara.
ARE YOU READY?
Ambiance qui a été préservée au mieux dans la série animée. Pourtant, l'annonce d'un animé adapté de Sengoku Basara a soulevé de nombreux doutes dans le monde bizarre des otakus: les adaptations de jeux en anime sont rarement des chef-d'oeuvres, et le studio qui s'occupe de la série, IG, avait à son actif quelques productions jugées décevantes. Mais pour une fois, le mélange à dépassé toutes les espérances: on obtient au final une série purement épique, faite de combats grandioses, de pseudo-stratégies tordues débouchant sur d'énormes tranches de n'importe quoi...
Avec un tel panel de généraux charismatiques au possible, les combats ont une classe folle, ponctués comme ils le sont de retournements de situations sortis du chapeau (WTF, if you prefer). Leur ridicule totalement assumé et la grande accumulation de clichés rappelle immédiatement Tengen Toppa Gurren Lagann: tout est basé sur des montées d'adrénaline à vous décrocher la mâchoire, les affrontements étant tellement exagérés qu'ils atteignent une classe incroyable, à mon sens quasi-inégalable par une série se prenant au sérieux. Là, le fait même que la série soit humoristique et basée avant tout sur son absence totale de retenue arrive à générer une émotion incroyable chez le spectateur... Les persos dégagent tous une classe et une virilité incroyable, nous immergeant à fond dans l'univers; la seule question reste: jusqu'où oseront-ils aller? Entre les déchaînements de puissance qui balaient des armées entières, les coups d'épée qui balancent de la lumière, les chevaux qui montent sur des murs VERTICAUX, ou encore la femme-ninja à moitié à poil qui a un véritable ORGASME chaque fois que son chef lui parle, on est à la fois morts de rire, sciés, et scotchés à notre écran à en demander encore... c'est jouissif, tout simplement.
Et en plus, graphiquement, la série est magnifique. Les décors sont travaillés et très colorés, la 3D ne fait pas tache pour deux sous, et l'animation est irréprochable. Les combats, mis en scène nerveusement et avec une caméra qui suit le délire, ont un rendu fantastique; les deux premiers duels entre Yukimura et Masamune sont véritablement sublimes, et on sent toute la passion qui se dégage des deux guerriers rien qu'en voyant les enchaînements de coups.
Et que dire de la musique? Parfaitement adaptée, très présente, et qui en jette vraiment combinée au délire général. Le thème du grand méchant (Oda Nobunaga, comme dans les trois quarts des fictions le concernant) se fait particulièrement remarquer, avec sa montée en puissance et ses choeurs majestueux, le tout combiné au ciel d'orage "infernal" qui accompagne chaque apparition du Roi Démon.Le scénario, par contre... bon, il n'est pas si inexistant que ça, même si il tient facilement sur les deux faces d'un post-it: les multiples provinces, en guerre les unes contre les autres, doivent rapidement mettre leurs conflits de côté, pour s'allier contre la menace du 6ème seigneur des Ténèbres, Oda Nobunaga, qui cherche à dominer le pays entier en écrasant toute résistance, brûlant et massacrant sans pitié. De plus, les personnages ont -quand même- des relations entre eux, et même si celles-ci ne vont pas très loin (rivalité passionnée Masamune/Yukimura, plus rationnelle entre les seigneurs Kenshin et Shingen, ou liens divers vassal/seigneur), elles ajoutent un petit plus à l'ambiance
complétement barrée de la série. Et quelques références historiques viennent agrémenter le tout, prouvant qu'il y a eu une certaine recherche derrière (une bonne partie venant directement du jeu vidéo). Cependant, le grand nombre de personnages, et le fait que l'Histoire du Japon est assez perméable à nous autres occidentaux ne facilite pas la compréhension de toutes les références, surtout que nous n'avons que 12 épisodes pour retenir qui est qui. Mais, au fond, peu importe; malgré quelques subtilités ici et là (comme le passage chez le seigneur-voleur cynique et désabusé à l'épisode 9), cette histoire n'est qu'un prétexte pour nous montrer des persos charismatiques au possible s'affronter dans des duels épiques. La fureur guerrière qui se dégage est parfois tellement fascinante que l'on ne ressent plus vraiment le besoin d'en chercher la justification en lisant les dialogues.
En bref, voilà une série (jeu comme animé) qui place avant toute chose le plaisir d'assister à une débauche de rage guerrière virile et complétement déjantée, ne s'imposant aucune limite. Pas la peine donc d'y chercher autre chose qu'un excellent divertissement, mettant en scène des personnages tous plus GAR* les uns que les autres. La série animée est donc une excellente surprise qu'il ne faut pas hésiter à regarder si vous recherchez un générateur d'adrénaline pure, vous plongeant au coeur d'affrontements dantesques. Une seconde saison à déjà été annoncée pour 2010.
Are you ready Guys? Put ya guns on!
Ten! Han! Zensou! Sanada Yukimura! Kenzan!
*GAR: terme Otaku désignant un personnage masculin particulièrement viril et charismatique. Serait apparu suite à un commentaire sur l'épisode 14 de Fate/stay night, dont l'auteur aurait dit qu'il était "gar for Archer", tellement le personnage dégageait de classe; gar étant une faute de frappe: l'intention originelle était bien sûr de dire "gay". Une autre version veut que ce soit simplement l'abréviation de Gay for ARcher.